Après une longue traversée du désert, les marchés des matières premières semblent avoir renoué avec la faveur des investisseurs.

Témoins de cet engouement, les deux indices sectoriels de la Bourse de Toronto qui regroupent les principales entreprises canadiennes de métaux industriels, de minerais et d'or affichent des rebonds de 115 % et de 93 %, respectivement, depuis le début de l'année.

Considérant que ces deux indices pèsent pour 258 milliards en capitalisation boursière, soit 14 % de tout l'indice de marché S&P/TSX, pas étonnant alors que la Bourse canadienne s'avère la plus performante cette année parmi les principaux marchés boursiers du monde industrialisé.

Toutefois, avertissent des analystes, cet engouement retrouvé des investisseurs envers les matières premières, en particulier les métaux industriels, pourrait encore s'avérer un peu prématuré.

On risque même une correction pour les métaux industriels dont l'équilibre de marché entre l'offre des producteurs et la demande réelle - et non celle anticipée des spéculateurs - demeure relativement fragile dans une économie mondiale en faible croissance.

« Le marché mondial des matières premières demeure mené par la conjoncture industrielle en Asie, en Chine en particulier. Et même si l'impact économique du vote Brexit en Grande-Bretagne (sortie de l'Union européenne) devait affecter la demande industrielle en Europe, elle ne compte que pour 8 % à 15 % de la demande mondiale, selon les différents métaux. Par conséquent, nous surveillons les prochaines décisions de politique monétaire en Asie (baisse de taux, dévaluation de devises) afin de soutenir la croissance économique et industrielle », ont commenté les analystes mondiaux des matières premières chez Credit Suisse, dans un billet publié par le journal boursier américain Barron's.

Avis semblable de la part du danois Ole Hansen, analyste et stratège principal des marchés de matières premières à la banque européenne Saxo.

« L'intérêt des investisseurs envers les métaux industriels se maintient sur des attentes d'une politique monétaire encore accommodante (faible taux) de la Réserve fédérale américaine (Fed) afin de contrer le regain d'inquiétude envers la croissance économique », a résumé M. Hansen à l'agence d'informations financières Bloomberg.

Plus près de nous, au Mouvement Desjardins, on préfère regarder au-delà des « facteurs financiers » comme le taux de change du dollar américain, qui influence beaucoup les cours des matières premières à court terme, afin de jauger des perspectives du marché.

Jimmy Jean, économiste principal chez Desjardins, souligne que « les facteurs fondamentaux du marché des métaux industriels demeurent favorables au maintien d'une hausse de la demande à moyen terme. »

En Chine en particulier, mentionne-t-il en entretien avec La Presse Affaires, « le ralentissement de la croissance des secteurs industriels et de la construction s'avère beaucoup moins brutal que ce que l'on appréhendait il y a un an. En fait, même ralentie, la croissance en Chine demeure plus importante que presque partout ailleurs dans le monde. »

Dans leur plus récent bulletin de juin (le prochain en août, après une pause en juillet), les économistes de Desjardins soulignaient que « les derniers développements sont assez encourageants pour la demande de métaux alors que l'économie chinoise semble profiter des mesures de relance du gouvernement, et que tout indique que l'économie américaine a renoué avec une croissance solide après un premier trimestre décevant. »

À la Bourse de Toronto, la valeur des plus grandes entreprises de métaux a bénéficié du regain d'intérêt des investisseurs. Mais à des degrés variables.

Par exemple, les actions du géant canadien de la potasse, Potash Corp, ont encore souffert des manigances commerciales entre ses gros concurrents de Russie et de Biélorussie.

En contrepartie, les actions de gros producteurs de minéraux industriels comme le charbon sidérurgique et le cuivre, Teck Resources et First Quantum, se sont appréciées respectivement de 222 % et de 85 % depuis le début de l'année.

MINÉRAUX ET MÉTAUX À SUIVRE

(selon la capitalisation, Bourse de Toronto)

POTASH CORP

Activités : exploitation de six mines de potasse (ingrédient de fertilisants agricoles) en Saskatchewan (5) et au Nouveau-Brunswick (1)

COURS RÉCENT : 21,02 $

VARIATION ANNÉE À DATE : -11 %

MULTIPLE COURS/BÉNÉFICE : 14,5 fois

RECOMMANDATIONS D'ANALYSTES :  1 acheter fortement/1 acheter/7 conserver/1 vendre

PRIX CIBLE D'ANALYSTES : 16,24 $

TECK RESOURCES

Activités : extraction minière et affinage de charbon sidérurgique, de cuivre, de zinc et de plomb

COURS RÉCENT : 17,22 $

VARIATION ANNÉE À DATE : + 222 %

MULTIPLE COURS/BÉNÉFICE : s.o. (à perte)

RECOMMANDATIONS D'ANALYSTES : 2 acheter fortement, 4 acheter, 10 conserver, 2 vendre

PRIX CIBLE D'ANALYSTES : 12,88 $

FIRST QUANTUM MINERALS

Activités : développement et exploitation de gisements miniers de cuivre, de nickel, de zinc et d'or.

COURS RÉCENT : 9,41 $

VARIATION ANNÉE À DATE : + 81 %

MULTIPLE COURS/BÉNÉFICE : s.o. (à perte)

RECOMMANDATIONS D'ANALYSTES :  4 acheter fortement, 8 acheter, 8 conserver

PRIX CIBLE D'ANALYSTES : 10,16 $

LUNDIN MINING

Activités : exploitation de mines au Chili (cuivre, or), au Portugal (cuivre, zinc), en Suède (zinc, plomb) et en Espagne (nickel, cuivre)

COURS RÉCENT : 4,63 $

VARIATION ANNÉE À DATE : + 22 %

MULTIPLE COURS/BÉNÉFICE : s.o. (à perte)

RECOMMANDATIONS D'ANALYSTES :  6 acheter fortement, 10 acheter, 6 conserver, 2 vendre

PRIX CIBLE D'ANALYSTES : 5,38 $

Sources : Thomson Reuters, Bourse de Toronto

Infographie La Presse