Bien qu'elles souhaitent un nouvel accord sur le bois d'oeuvre avec les États-Unis, les entreprises forestières canadiennes ne veulent pas entendre parler de quotas à l'exportation.

Selon le président et chef de la direction de Produits forestiers Résolu, Richard Garneau, des rumeurs circulent depuis la semaine dernière à l'effet que les États-Unis voudraient imposer une limite sur les exportations canadiennes de bois d'oeuvre.

Il s'agit d'une position défendue depuis longtemps par la coalition américaine des producteurs de bois d'oeuvre, mais rejetée par l'industrie canadienne, désireuse de profiter de la reprise des mises en chantier au sud de la frontière.

M. Garneau croit toutefois que les producteurs du centre du Canada, dont le Québec et l'Ontario, devraient bénéficier du libre-échange au chapitre du commerce du bois d'oeuvre.

En entrevue téléphonique, il a notamment cité l'instauration du nouveau régime forestier au Québec en avril 2013, qui, à son avis, est une copie de ce qui se fait aux États-Unis en raison du système d'enchères.

«Avec les changements, c'est ici que le coût d'acquisition du bois est le plus élevé, a expliqué M. Garneau. Je ne vois pas la raison pour laquelle il devrait y avoir des quotas.»

Cette position de la plus importante compagnie forestière de la province est également celle défendue par le Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ), qui estime que le secteur génère 153 000 emplois directs et indirects dans la province.

Même dans l'Ouest canadien, une grande partie des producteurs de bois d'oeuvre se sont aussi prononcés contre l'instauration de quotas.

L'accord de 2006 entre le Canada et les États-Unis sur le bois d'oeuvre s'était conclu au terme de cinq ans de batailles devant les tribunaux.

En dépit de son échéance, les autorités américaines ne peuvent imposer de tarifs douaniers sur les produits canadiens du bois jusqu'en octobre prochain.

Satisfaites de voir que le dossier a été abordé par le premier ministre Justin Trudeau et le président Barack Obama le mois dernier à Washington, Résolu et Tembec concèdent que cela n'est pas garant d'un accord avant l'échéance de la période de grâce.

«Je suis satisfait de voir que c'est sur le radar, a expliqué le président et chef de la direction de Tembec, James Lopez, plus tôt cette semaine, au cours d'une conférence téléphonique. Par contre, c'est vraiment un dossier compliqué.»

MM. Trudeau et Obama avaient convenu d'une période de discussions intensives de 100 jours afin de trouver un terrain d'entente. À mi-chemin dans le processus, Ottawa n'a pas encore indiqué s'il y avait eu des progrès.

«Notre objectif est d'assurer un accès stable au marché américain pour les producteurs canadiens de bois d'oeuvre», a indiqué par courriel Alex Lawrence, porte-parole de la ministre du Commerce international, Chrystia Freeland.

Sans dire s'il était confiant de voir les négociations aboutir avant octobre, le grand patron de Résolu estime que la visite de M. Obama à Ottawa le 29 juin, dans le cadre du sommet entre le Canada, les États-Unis et le Mexique, pourrait être un moment charnière.

«C'est une occasion en or pour le gouvernement canadien de vraiment mettre l'entente sur les rails», croit M. Garneau.

Toutefois, l'absence de progrès dans les pourparlers et l'approche du scrutin présidentiel au sud de la frontière sont deux facteurs qui compromettent grandement les chances d'en arriver à une entente avant octobre, croit Hamir Patel, de CIBC Marchés des capitaux.

Dans une note, l'analyste dit s'attendre à ce que les Américains effectuent des démarches pour tenter d'imposer des tarifs douaniers dès 2017 qui seraient également rétroactifs jusqu'à octobre 2016.

«Il pourrait ainsi en résulter une réduction de la progression dans le centre et l'est du Canada vers la fin de 2016», écrit M. Patel.