Le géant espagnol FerroAtlantica a surpris le gouvernement Couillard et Port-Cartier en renonçant à son important projet de silicium métal qui devait voir le jour dans cette municipalité de la Côte-Nord.

Annoncé en janvier 2014 par le gouvernement péquiste de l'époque, cet investissement de 382 millions $ devait entraîner la création de 345 emplois directs.

Selon l'entreprise, l'accroissement de la production chinoise de silicium vient perturber l'équilibre du marché et l'oblige à se contenter d'optimiser ses installations actuelles, notamment en Europe.

«Cette décision n'est pas motivée par des enjeux locaux, a expliqué mercredi le président Pedro Larrea Paguaga, par voie de communiqué. Malheureusement, pour FerroAtlantica, aucun nouveau projet ne peut rivaliser avec la possibilité de consolider nos propres installations.»

Il s'agit du deuxième projet industriel d'envergure qui écope en peu de temps au Québec. La semaine dernière, citant les faibles prix de l'urée, la Coop fédérée et la coopérative indienne IFFCO ont de nouveau mis sur la glace leur projet d'usine de 2 milliards $ à Bécancour, dans le Centre-du-Québec.

FerroAtlantica, qui n'a pas voulu accorder d'entrevues, a néanmoins souligné dans un communiqué l'appui reçu par la municipalité de Port-Cartier depuis l'annonce du projet d'usine.

De son côté, le ministre de l'Économie, Jacques Daoust, qui a appris la nouvelle tard mardi, a affirmé être encore «sous le choc» et précisé que son gouvernement «ne s'y attendait pas».

«Leur grand patron s'était déplacé à Port-Cartier (en juin 2014) et avait même dit qu'il ne reculait jamais sur un projet, a-t-il dit, au cours d'un entretien téléphonique avec La Presse Canadienne. Pour nous, c'est la consternation.»

Également courtisée par Saguenay, Baie-Comeau et Shawinigan, FerroAtlantica avait arrêté son choix sur Port-Cartier en raison de la présence d'un quai municipal en eau profonde ouvert à l'année ainsi que de la proximité d'un chemin de fer.

L'entreprise aurait également bénéficié de tarifs d'électricité préférentiels d'Hydro-Québec.

M. Daoust a dit avoir tenté de convaincre le géant espagnol de revenir sur sa décision, mais en vain.

«Notre aide se limitait à de l'accompagnement, a-t-il dit. Il n'y avait pas de subvention et le gouvernement et participait pas au capital. C'est pour cela que nous sommes un peu démunis.»

«FerroAtlantica est victime de la Chine qui veut aller chercher des marchés, a ajouté le ministre de l'Économie. Ça se fait sur notre dos et c'est regrettable. On ajoute de la capacité mondiale et les prix baissent.»

Jointe au téléphone, la mairesse de Port-Cartier, Violaine Doyle, a confié avoir appris cette nouvelle «extrêmement décevante» tôt mercredi.

«On fondait beaucoup d'espoir en misant sur ce projet, a-t-elle dit. C'était un projet de diversification économique.»

Malgré la décision de FerroAtlantica, Mme Doyle a rappelé que le quai de Port-Cartier était toujours là, ajoutant avoir eu des discussions à ce sujet avec le ministre responsable du Plan Nord et de la Côte-Nord, Pierre Arcand.

La mairesse de Port-Cartier a prévenu que la municipalité aurait maintenant besoin de la collaboration de «tous les ministères» pour faire aboutir rapidement les divers projets d'investissement pour le quai.

Si le projet d'usine de la multinationale avait vu le jour, sa filiale FerroQuébec avait comme objectif de produire annuellement 100 000 tonnes de silicium métal - qui entre dans la production d'alliages destinés à l'industrie automobile - destinées essentiellement au marché américain.

FerroAtlantica - qui compte 3100 employés répartis dans 15 usines à travers le monde - est l'un des principaux producteurs de silicium métal et d'alliages de manganèse et de ferrosilicium. En 2014, ses ventes se sont établies à 1,1 milliard d'euros.