Les premiers ministres des provinces et des territoires canadiens se sont entendus pour déployer une stratégie nationale sur l'énergie axée à la fois sur le développement des projets et la nécessité d'agir contre les changements climatiques, mettant fin à des jours de querelles sur l'équilibre à atteindre entre la croissance économique et la protection de l'environnement.

Dans un communiqué publié vendredi, les dirigeants affirment que cette stratégie donnera aux provinces et aux territoires la base nécessaire afin de travailler ensemble sur les priorités dans le secteur de l'énergie.

Selon eux, ce sont leurs niveaux de gouvernement qui sont les mieux placés pour assurer le développement et le transport des ressources énergétiques, tout en adoptant de nouvelles technologies permettant de faire la transition vers une économie moins dépendante aux hydrocarbures.

Les provinces et les territoires doivent se concentrer à améliorer l'efficacité énergétique et à diminuer leur empreinte carbone en faisant la promotion d'innovations technologiques, écrivent-ils dans le communiqué.

Les différents gouvernements disent qu'ils travailleront ensemble sur les enjeux énergétiques, en tenant compte de leurs forces, leurs défis et leurs priorités.

La conclusion de l'entente survient alors que le premier ministre de la Saskatchewan, Brad Wall, avait critiqué certains de ses collègues qui, selon lui, ne considéraient pas assez l'importance des industries pétrolière et gazière dans le développement de l'économie.

Il a notamment visé l'Ontario et le Québec, soutenant que leurs positions mettent de côté les lucratives ressources de gaz et de pétrole pendant que ces provinces profitent de la péréquation financée en partie par les revenus de ces industries.

Dans le communiqué, les premiers ministres demandent également au gouvernement fédéral de «s'engager concrètement» avec eux pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

«Les premiers ministres des provinces et territoires invitent le gouvernement fédéral à travailler avec eux à la mise en place d'un environnement d'affaires qui favorisera le développement et les investissements dans les technologies vertes, les énergies renouvelables et les produits faibles en carbone», écrivent-ils.

Malgré ses réticences initiales, M. Wall a expliqué vendredi ce qui l'a convaincu. Il a mentionné un chapitre de la stratégie sur le transport du pétrole au pays qui parle d'indépendance énergétique et de l'importance d'ajouter de la valeur à ce qui est exporté.

«Dans notre pays, malgré les vastes réserves de pétrole que nous avons en Alberta et en Saskatchewan et à Terre-Neuve-et-Labrador, et dans d'autres endroits, nous importons du pétrole d'autres pays, a-t-il dit. Cela me semble inacceptable. Nous devons utiliser notre propre pétrole, y ajouter de la valeur ici, et ensuite l'exporter dans des marchés autres que les États-Unis.»

La première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne, a exprimé son soutien pour les mesures environnementales incluses dans la stratégie, affirmant que les premiers ministres ont trouvé un juste équilibre.

«Il y a la question d'une économie forte et celle d'avoir de solides protections environnementales et ces deux choses ne sont pas mutuellement exclusives, a-t-elle dit. En fait, elles doivent être complémentaires. Et cela, pour moi, est le travail fondamental de ce document.»

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a aussi défendu le document de l'entente.

«Voyons d'où nous venions. On est arrivés au début des travaux sur ce document avec un document qui était quasi-muet sur la question de l'environnement et des changements climatiques. Alors c'est un progrès considérable qui a été accompli par le fait même que ces questions ont été bien intégrées», a-t-il soutenu.

Il s'est aussi réjoui que l'énergie n'ait pas seulement été abordée sous l'angle de celles qui sont non renouvelables, mais aussi de celles qui le sont, notant que pour ces dernières, «le Québec joue un grand rôle».

Concernant l'absence de cibles précises de réduction des émissions dans le document, M. Couillard a fait valoir qu'il fallait «respecter les réalités différentes à travers le pays», ajoutant qu'il revenait de toute façon à chaque province d'annoncer ses propres cibles.

Il a rappelé en point de presse la cible du Québec d'une baisse de 20 pour cent des émissions par rapport à 1990 d'ici 2020, et des objectifs d'ici 2050 d'une baisse de 80 à 90 pour cent des émissions ou de deux à dix tonnes par année par habitant. M. Couillard a mentionné que des cibles pour 2030 seraient annoncées «très bientôt».

Une entente sur un plan national visant à guider les futurs projets énergétiques tout en protégeant l'environnement figure à l'ordre du jour des premiers ministres provinciaux depuis 2012.

Alors que Brad Wall a changé de ton vendredi après ses positions plus agressives plus tôt cette semaine, il défendait quand même le pétrole et le gaz alors que la réunion tirait à sa fin.

«Le pétrole et le gaz ne sont pas des jurons», a-t-il lancé.

Quant à la première ministre de la Colombie-Britannique, Christy Clark, elle s'est servie de son expérience pour promouvoir l'entente, soulignant que sa province s'est dotée d'une taxe sur le carbone depuis sept ans et que cela n'a pas nui à l'économie.

«Nous sommes les meneurs au pays en termes de croissance économique même si les gens avaient dit qu'une taxe sur le carbone allait la tuer», a-t-elle déclaré.