Les patrons de différentes entreprises propriétaires d'oléoducs ont été surpris, le mois dernier, lorsque la salle où ils donnaient une conférence à Calgary était pleine à craquer. Considérés, à une certaine époque, comme un domaine d'affaires sans grand intérêt, les oléoducs ont dominé une partie du discours public en 2014.

Au cours des dernières années, le débat a porté tant sur les impacts environnementaux de la simple structure dans le sol aux changements climatiques, en passant par les droits des Premières Nations. Les différents projets de construction proposés ont certainement fait quelque progrès dans les 12 derniers mois, mais leur sort est loin d'être certain, d'autant plus que les entreprises devront se lever de plus en plus tôt pour obtenir la faveur sociale.

Enbridge (TSX:ENB), par exemple, a depuis cet été ce permis fédéral, sujet à 209 conditions, pour construire l'oléoduc Northern Gateway qui pourrait transporter 525 000 barils de pétrole par jour de l'Alberta à la côte ouest. Mais la première pelletée de terre n'est pas près d'être photographiée. Enbridge en est maintenant à se rasseoir avec les Premières Nations de la Colombie-Britannique vivant le long de l'oléoduc projeté, qui s'y opposent, par crainte de voir un déversement détruire les milieux naturels sur lesquels ils comptent.

Les oléoducs ont également été le centre de débats publics dans la population générale en regard de la lutte contre les changements climatiques. Al Monaco d'Enbridge croit que les groupes écologistes ont fait un choix stratégique en s'attaquant aux oléoducs pour ralentir l'expansion des sables bitumineux et les émissions de gaz à effet de serre.

«Vous en prendriez-vous à 100 entreprises en amont de la chaîne ou à 100 raffineries? Non, cela a beaucoup de sens de s'en prendre au secteur médian de la chaîne de valeur», a-t-il dit.

Au Québec, le débat a été vif autour de la construction à Cacouna d'un port pétrolier, qui présenterait des risques pour les bélugas du Saint-Laurent. Cacouna se trouverait sur la route de l'oléoduc Énergie Est de TransCanada, qui se rendrait jusqu'au Nouveau-Brunswick.

De l'importance de l'acceptabilité sociale

Les efforts des gouvernements et de l'industrie pour susciter le soutien du public aux oléoducs portent bien peu fruit, admet Michael Cleland, de la société pétrolière Nexen et de la firme de lobbying Canada West Foundation. «Il semble que peu importe où on regarde, on voit de la discorde et un grand potentiel pour qu'elle grandisse.»

M. Cleland, un ancien sous-ministre adjoint au ministère fédéral des Ressources naturelles, considère qu'il y a une rupture «de la confiance fondamentale dans les différentes institutions».

«Les gens sentent qu'ils ne peuvent pas s'impliquer, que leur voix ne sera pas entendue sur plein de sujets, notamment sur ce qu'on fait pour gérer les gaz à effet de serre et ce qu'on fait pour l'utilisation du territoire régional à long terme, etc.»

Mais l'industrie semble au moins avoir compris l'importance d'être présent à l'échelle locale très tôt dans leur démarche.

Le mois dernier, au même moment où se déroulait une rencontre entre dirigeants du secteur pétrolier sur l'avenir de l'industrie, la police dispersait, au mont Burnaby près de Vancouver, des manifestants opposés à des travaux d'exploration que la société Kinder Morgan menait en vue de tripler la capacité de l'oléoduc Trans Mountain.

«Quand vous tentez d'entreprendre un projet, vous vous trouvez toujours dans le cycle politique de quelqu'un, a dit le président de cette entreprise, Ian Anderson. Vous êtes toujours en mode campagne, peu importe si c'est au municipal, au provincial ou au fédéral. Ça va toujours faire partie de la vie.»