Le géant vancouvérois Goldcorp bonifiera-t-il son offre d'achat hostile pour la société aurifère québécoise Osisko afin de supplanter l'entente surprise annoncée mercredi avec Yamana Gold? Les analystes sont divisés à ce sujet.

«Nous savons que [Goldcorp] a la capacité de revenir et de hausser son offre», a déclaré l'analyste Joseph Fazzini, de Dundee Capital Markets, à l'agence de presse Bloomberg. «Ils ont dit qu'ils préféraient abandonner plutôt que d'augmenter leur offre, mais en toute franchise, nous continuons de penser qu'ils vont revenir.»

Pawel Rajszel, analyste chez Veritas Investment Research, abonde dans le même sens. «Goldcorp convoite cet actif depuis cinq ans, alors il serait illogique de le laisser filer», a-t-il affirmé au Wall Street Journal.

Dan Rollins, analyste chez RBC Marchés des Capitaux, estime qu'il y a une «possibilité raisonnable» que Goldcorp hausse son offre de façon à procurer une «légère prime» aux actionnaires d'Osisko par rapport à la proposition de Yamana. M. Rollins croit toutefois que Goldcorp «prendra son temps» avant de trancher.

Goldcorp a d'ailleurs annoncé hier qu'elle prolongeait jusqu'au 15 avril son offre pour Osisko, qui devait expirer aujourd'hui. L'entreprise poursuit sa vérification diligente de la mine Canadian Malartic d'Osisko en Abitibi, amorcée plus tôt cette semaine. Elle analyse aussi le projet de transaction avec Yamana, a précisé le PDG de Goldcorp, Chuck Jeannes.

Les analystes Michael Siperco, de Macquarie Capital Markets, et Steven Green, de Valeurs mobilières TD, avancent eux aussi que Goldcorp est susceptible de surenchérir.

Trop cher?

Eric Coffin, analyste chez HRA Advisories à Vancouver, croit toutefois que Goldcorp devrait laisser tomber. «Je ne pense pas que j'augmenterais beaucoup mon offre si j'étais eux, a-t-il dit à La Presse Affaires. Des fois on gagne, d'autres fois on perd.»

Rappelons qu'avec l'offre de Yamana, unanimement qualifiée de complexe, les actionnaires d'Osisko recevraient environ 7,60$ par action (2,19$ au comptant, 2,06$ sous la forme d'une participation dans Yamana et 3,35$ sous la forme d'une action de la nouvelle Osisko). Yamana acquerrait ainsi la moitié des actifs d'Osisko. Le prix de 7,60$ est environ 22% plus élevé que l'offre de Goldcorp, qui valait 6,21$ mardi.

«Si on exclut les considérations politiques [notamment le maintien du siège social d'Osisko à Montréal], du point de vue d'un actionnaire d'Osisko, Goldcorp n'aurait qu'à égaler le prix de Yamana pour avoir le dessus, commente le gestionnaire de fonds américain Adrian Day au cours d'un entretien téléphonique. Ce serait probablement préférable à l'entente embrouillée conclue avec Yamana. Mais une augmentation de 22%, ce n'est pas rien. Je ne suis pas sûr que Goldcorp fera ça.»

Son collègue Robert Gill, de Lincluden Investment Management, souligne que la participation de la Caisse de dépôt et placement du Québec et de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada dans l'entente conclue entre Yamana et Osisko pourrait refroidir les ardeurs de Goldcorp.

«Il pourrait être difficile de monter une autre transaction du genre en se passant de leur contribution», a-t-il indiqué à Bloomberg.

La bataille pour Osisko est la plus importante dans le secteur aurifère nord-américain depuis la fin de 2011, alors que le cours de l'or dépassait les 1600$. Hier, le métal jaune cotait 1284$US. Plusieurs sociétés minières se montrent actuellement prudentes, ayant dû dévaluer des acquisitions effectuées à fort prix pendant que les marchés des matières premières s'enflammaient. Certains analystes évaluent déjà que l'offre de Yamana pour Osisko est trop généreuse.

L'action d'Osisko a clôturé à 7,22$ hier, en baisse de 1,8%, à la Bourse de Toronto.