L'augmentation de la production mondiale de pétrole, conjuguée à une faible hausse de la demande, risque de mettre les prix du brut sous pression en 2014 et compliquer la tâche de l'OPEP qui veut maintenir le baril à 100 dollars.

L'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a décidé mercredi à Vienne de laisser inchangé son plafond de production fixé à 30 millions de barils par jour (mbj), afin de «maintenir l'équilibre du marché», lors de sa 164e réunion ministérielle.

Mais les ambitions de l'Irak et de l'Iran, l'éventuel rétablissement de la production libyenne et la forte progression de la production de brut américaine pourraient conduire à une surabondance en 2014, alors même que la demande n'est attendue qu'en faible hausse (+1 mbj selon l'Agence internationale de l'Énergie), estiment des experts interrogés par l'AFP.

«Nous pourrions potentiellement avoir une situation de surabondance de l'offre en 2014», prévient Bill Farren Price, président de Petroleum Policy Intelligence.

«Il y a des inquiétudes sur le fait qu'on puisse observer une augmentation de l'offre de la part de l'Iran, de l'Irak, de la Libye et de l'Amérique du Nord», abonde Jason Schenker, économiste et président de Prestige Economics.

Les États-Unis produisent actuellement 8 mbj, soit 50% de plus qu'il y a cinq ans grâce à l'exploitation du pétrole de schiste, tandis que l'Irak ambitionne d'augmenter ses exportations de brut de 1 mbj l'année prochaine.

De son côté, l'Iran affirme pouvoir revenir très rapidement à son niveau de production d'avant les sanctions, soit 4 mbj, si celles-ci étaient levées.

Si Téhéran parvient à un accord définitif avec les grandes puissances au sujet de son programme nucléaire controversé, «on verrait bien plus de pétrole arriver sur le marché», prévient M. Schenker. «C'est le principal risque (pour les prix), pas le pétrole de schiste», selon lui.

De plus, le ministre libyen du Pétrole Abdelbari al-Aroussi s'est déclaré mercredi «optimiste» quant à un rétablissement rapide de la production de son pays, actuellement perturbée, à son niveau normal de 1,5 mbj.

Tout cela «pourrait tester la capacité de l'OPEP à contrôler la production et à garder les prix au-dessus du niveau désiré de 100 dollars par baril», estiment dans une note les experts du Centre d'études énergétiques mondiales (CGES).

«Mi-2014, ce sera un défi pour l'OPEP de réfléchir au respect de leur cible» de production, renchérit M. Schenker.

L'Arabie saoudite, premier producteur mondial de brut et chef de file de l'OPEP, a maintes fois déclaré que le niveau de 100 dollars était «idéal» tant pour les producteurs que pour les consommateurs.

Les analystes du CGES notent tout particulièrement que l'augmentation annoncée de la production irakienne «augmenterait la pression sur les autres membres de l'OPEP, principalement sur l'Arabie saoudite, pour réduire la production afin d'éviter la chute des prix du pétrole», même si «l'objectif (de l'Irak) semble optimiste étant donné les contraintes d'infrastructures et les problèmes de sécurité».

Justement, certains analystes mettent en doute une telle augmentation de l'offre de la part des pays de l'OPEP produisant actuellement moins que leurs capacités.

«Je suis très sceptique (...) car en Irak, l'augmentation de la production est bien plus lente» qu'annoncée, indique à l'AFP Cornelia Meyer, analyste indépendante et président de MRC Corporation.

«Je reviens de Libye et je ne vois pas comment ils vont retourner à la normale», ajoute-t-elle, parlant d'un pays dans «un état défaillant».

Selon elle, la forte augmentation tant redoutée de la production ne pourrait intervenir qu'en 2015. Elle mise en conséquence sur un maintien des prix du brut autour de 100 dollars l'année prochaine.

À l'inverse, le cabinet Capital Economics, qui table sur un retour de l'Iran et un rétablissement plus prompt de la Libye, estime que le Brent devrait chuter à 90 dollars le baril (contre environ 112 dollars actuellement) d'ici fin 2014.