Le grand patron de Rio Tinto (RIO), Sam Walsh, a révélé hier que l'entreprise a sérieusement envisagé de se séparer de sa division Alcan, acquise à fort prix en 2007.

«Après une longue analyse au cours de laquelle nous nous sommes demandé si une vente, un essaimage [spin-off] ou une entrée en Bourse de ce groupe étaient des options viables, nous avons décidé que l'aluminium allait continuer de faire partie de notre portefeuille diversifié», a déclaré M. Walsh au cours d'une rencontre avec les analystes financiers tenue à Sydney, en Australie.

Il y a deux ans, Rio Tinto avait mis en vente 13 de ses usines les moins rentables, soit le tiers de sa capacité de production. L'entreprise n'a trouvé preneur que pour une poignée de ces installations. Des acheteurs potentiels ont néanmoins proposé d'acquérir la totalité de Rio Tinto Alcan, mais l'entreprise a jugé les offres trop basses.

En ce qui concerne l'idée de remettre Alcan en Bourse, Rio Tinto ne semble pas l'avoir soupesée trop longtemps. «Cette division doit générer des liquidités suffisantes pour lui permettre d'être autonome, a indiqué Sam Walsh. Je n'ai pas l'intention de faire quelque chose qui deviendra bancal au bout de 10 minutes.»

Surcapacité de production

Après plusieurs années de surcapacité, le marché de l'aluminium se trouve actuellement en léger déficit, mais les cours demeurent déprimés, a souligné hier la chef de la direction de Rio Tinto Alcan, Jacynthe Côté. Le prix d'une tonne d'aluminium est d'environ 1700$ ces jours-ci, soit 1000$ de moins qu'en 2011.

Compressions

M. Walsh s'est dit satisfait des mesures de redressement mises en place par Mme Côté au cours des dernières années. Depuis le début de 2013, Alcan a réduit ses coûts de 450 millions US, soit le quart des économies effectuées par Rio Tinto cette année. Des compressions additionnelles de 650 millions US sont prévues l'an prochain chez Rio Tinto Alcan, un objectif «ambitieux», a reconnu la dirigeante québécoise.

Devant les analystes, Jacynthe Côté s'est félicitée d'avoir «retiré de la division plus de 1700 employés au cours des neuf premiers mois de l'année grâce à une amélioration de la productivité». Depuis 2009, Rio Tinto Alcan a supprimé 2400 postes, dont 725 au Québec. L'aluminerie de Beauharnois a fermé en 2009, alors que celle de Shawinigan vient de cesser ses activités.

Des emplois ont également été retranchés au siège social de Montréal, où les effectifs sont passés de 825 il y a deux ans à un peu plus de 700, a précisé hier une porte-parole de Rio Tinto Alcan, Claudine Gagnon. Les autres divisions de Rio Tinto ont fait de même à Londres, Melbourne et Brisbane, a noté M. Walsh.

Investissements

L'Australien, qui a remplacé Tom Albanese à la tête de Rio Tinto en janvier, a par ailleurs annoncé hier une nouvelle réduction des investissements en immobilisations. Après avoir atteint un sommet historique de plus de 17 milliards US en 2012, ils ont été abaissés à 14 milliards US cette année et ne devraient pas dépasser 8 milliards US en 2015.

L'entreprise concentrera ses investissements dans le secteur du fer, d'où Rio Tinto tire la plus grande partie de ses profits, et dans celui du cuivre.

Les divisions d'aluminium et d'énergie de Rio Tinto «auront du mal à obtenir de nouveaux capitaux», a prévenu Sam Walsh.

«Les faibles rendements de certains investissements réalisés au cours des dernières années font en sorte que les investisseurs demandent désormais de meilleurs résultats et des dépenses en immobilisations moins élevées», a-t-il expliqué.

Rappelons que Rio Tinto a dû radier près de 30 milliards US de la valeur d'Alcan, soit 79% du prix d'acquisition de 38 milliards US.

Plus tôt cette année, l'agence de notation Standard & Poor's a prévenu qu'elle pourrait abaisser la cote de crédit de Rio Tinto si l'entreprise ne réduit pas significativement sa dette, qui dépasse les 22 milliards US.

«Rembourser notre dette sera notre priorité en 2014», a promis M. Walsh.

Rio Tinto a par ailleurs confirmé hier avoir mis sur la glace son projet de vendre sa participation de 59% dans la Compagnie minière IOC, qui exploite une mine de fer et une usine de bouletage à Labrador City ainsi que des installations portuaires à Sept-Îles.

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RIO TINTO EN CHIFFRES

29,7 milliards US

Revenus en 2012

7,3 milliards US

Profits nets en 2012

71 000

Nombre de salariés

140

Années d'existence de l'entreprise