Pour extraire des pépites d'or, le patron d'une mine de la Baie-James est obligé de payer aux Cris une compensation financière qui a toutes les apparences d'une redevance sans en porter le nom. Comme plusieurs autres du genre, cette entente est secrète. Le gouvernement provincial veut maintenant rendre public le contenu de ces ententes.

«On n'a pas le droit d'appeler ça comme ça, mais des redevances, on en a», a prévenu Pascal Hamelin, vice-président des opérations chez Ressources Métanor [[|ticker sym='V.MTO'|]], en s'adressant aux députés de la commission parlementaire qui tient actuellement des consultations publiques sur le projet de loi 43 sur les mines. M. Hamelin accompagnait la délégation de la chambre de commerce de Val-d'Or à l'Assemblée nationale le 9 septembre.

En pratique, les Cris disposent d'un droit de veto sur tout projet minier de la Baie-James. Pour qu'une mine voie le jour, les Cris doivent donner leur autorisation. Pour obtenir leur aval, une minière doit prendre des engagements économiques auprès des communautés cries concernées, en conformité avec la politique minière crie écrite en 2010.

Métanor exploite la mine d'or Bachelor, à 30 kilomètres du village cri de Waswanipi. En septembre 2012, Métanor et Waswanipi ont conclu une entente sur les répercussions et les avantages (ERA).

L'objectif de l'accord est de faire participer les Cris au projet minier, eux qui ont été traditionnellement exclus de ce secteur d'activité. Par exemple, l'accord garantit l'embauche et la formation de travailleurs cris et le recours à des fournisseurs autochtones.

Aspect controversé, l'ERA contient aussi un volet financier qui s'apparente à des redevances. Habituellement, seul le gouvernement du Québec a le droit d'exiger des redevances. Métanor doit ainsi payer en partant 350 000$ aux Cris, soit 1% de la valeur actuelle nette de la mine à l'étape de la préfaisabilité ainsi que 3,5% des profits futurs. Pour la minière, ces montants s'ajoutent aux redevances de 16% des profits que Métanor devra payer au gouvernement provincial.

«Ce n'est plus 16% qu'on paie, nous autres, c'est 20%. Pour exploiter cette mine d'or-là, c'est 20% de redevances. Ça, ce n'est pas connu», a ajouté M. Hamelin.

Joint au téléphone, M. Hamelin insiste pour dire que ses relations sont excellentes avec les Cris. Il souligne que l'argent perçu par la communauté autochtone est dépensé à bon escient.

L'article 163 du projet de loi 43 propose de rendre public le contenu de ces ententes, une mesure qui reçoit l'appui de M. Hamelin et de la chambre de commerce de Val-d'Or.

«Lors des négociations, on n'avait pas le moyen de savoir ce qui était dans les autres projets. On est en faveur de la transparence parce que les Cris, de leur bord, savent ce que Goldcorp a signé, ils savent ce que Stornoway a signé, mais nous autres, on ne peut pas le savoir», a déploré M. Hamelin pendant son intervention.

Fin de non-recevoir du côté des Cris

Dans son mémoire, le Grand Conseil des Cris s'oppose à la divulgation des ententes ERA et demande le retrait de l'article en question du projet de loi 43. Pour les Cris, les montants exigés ne sont pas des redevances. Il s'agit plutôt de paiements compensatoires qu'une minière accepte librement de verser en vertu de l'ERA.

«Une divulgation publique mènerait vraisemblablement à une surenchère et à un écart accru entre les positions des sociétés minières et des communautés autochtones, rendant beaucoup plus difficile la conclusion de ces ententes», lit-on dans la version française du mémoire.

Les Cris vont même jusqu'à déclarer qu'exiger la publication «pourrait défaire [...] la mise sur pied d'une nouvelle relation entre les Cris, le Québec et l'industrie pour un développement responsable des ressources dans Eeyou Istchee».

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Le nombre d'ententes sur les répercussions et les avantages (ERA) qui ont été signées entre les sociétés minières et les communautés autochtones en 2011 et 2012, selon le mémoire de la chambre de commerce de Val-d'Or.