Le moins qu'on puisse dire, c'est que l'industrie minière et les Abitibiens n'ont pas apprécié la hausse des redevances décrétée par le gouvernement péquiste au printemps.

La région estime toutefois que le temps est venu de passer à autre chose. «Les minières vont apprendre à vivre avec ça. Je pense qu'il faut tourner la page parce qu'à un moment donné, tout le débat là-dessus fait beaucoup plus mal que la hausse des redevances elle-même», affirme Jean-Claude Loranger, président de la chambre de commerce de Rouyn-Noranda.

Il faut dire que le Parti québécois (PQ) a beaucoup moins augmenté les redevances qu'il ne l'avait promis en campagne électorale, en raison notamment de l'intense lobbyisme mené par l'industrie minière. La ponction additionnelle s'élèvera à environ 50 millions par année à partir de 2015, bien loin des 388 millions envisagés au départ.

La région porte maintenant son attention sur le projet de réforme de la Loi sur les mines. L'idée de mieux encadrer l'industrie est généralement bien accueillie, mais plusieurs inquiétudes subsistent. On redoute notamment les nombreux pouvoirs discrétionnaires que la future loi donnerait au gouvernement et les contraintes qu'elle imposerait à l'exploration minière dans les périmètres urbains. Après tout, en Abitibi, bien des mines se trouvent près des villes, voire carrément dedans (le cas le plus célèbre étant la mine d'Osisko à Malartic).

Autres sources de préoccupations: les obligations qui seraient faites aux minières de réaliser des études de faisabilité sur la transformation de leur minerai au Québec et de soumettre tout projet d'exploitation au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE).

«On nous a dit que le processus du BAPE nous aurait coûté près de 1 million. Ça aurait sérieusement compromis le projet», dit Jean Bastien, directeur général chez Mines Richmont, en parlant de la mine Monique, qui vient de démarrer ses activités à l'est de Val-d'Or. Au cours actuel de l'or, le taux de rendement interne du projet de petite envergure - l'exploitation ne durera que 19 mois - est d'à peine plus de 3%.

«Ça ne veut pas dire qu'on ne consulte pas la population», ajoute M. Bastien, en rappelant que l'entreprise a organisé des rencontres avec les résidants des communautés voisines de Louvicourt et de Lac-Simon.

Le souvenir du Plan Nord

Qu'il s'agisse des redevances ou de la Loi sur les mines, les Abitibiens sentent beaucoup de convoitise de la part des politiciens et des entreprises des autres régions. Ce n'est pas sans leur rappeler la frénésie qui a entouré le dévoilement du fameux Plan Nord de Jean Charest, en mai 2011.

L'initiative a été vue par certains en Abitibi comme une maladroite «opération de marketing à l'étranger». Mais ironiquement, maintenant que le PQ l'a rebaptisée «Le Nord pour tous» sans en faire une priorité, ils sont de plus en plus nombreux dans la région à s'ennuyer de l'enthousiasme des libéraux.

«Le Nord pour tous, c'est moins tapageur que le Plan Nord, mais est-ce que ça se fait? Un moteur qui ne fait pas de bruit, c'est rare que ce soit très puissant», lance Jean-Yves Poitras, commissaire industriel de Val-d'Or et responsable du Centre de transit minier nordique, qui dessert des mines du Nunavik et du Nunavut.

«Il ne faut pas donner nos ressources, mais il faut s'assurer qu'on ne meurt pas avec elles», souligne-t-il.