L'action de la société canadienne Gabriel Resources a dégringolé lundi en Bourse après que la Roumanie a annoncé, après d'importantes manifestations, son intention de rejeter un projet de loi y accélérant l'ouverture d'une mine d'or.

Les investisseurs ont réagi nerveusement à cette annonce, l'action de Gabriel Resources cédant jusqu'à 60% dans les premiers échanges lundi à la Bourse de Toronto.

Vers 11h10, le titre chutait de près de 50% à 0,74$.

La coalition au pouvoir en Roumanie a cédé lundi à la pression de la rue et retiré son soutien à un projet de loi contesté en faveur d'une gigantesque mine d'or canadienne mais l'exploitation minière n'est pas enterrée, estiment les analystes.

Au lendemain d'une mobilisation record contre ce projet minier prévoyant l'utilisation de grandes quantités de cyanure, le premier ministre de centre gauche Victor Ponta a annoncé que le projet de loi adopté par son gouvernement deux semaines plus tôt pour accélérer le début de l'extraction «va être rejeté» par le Parlement.

«Il y a une majorité parlementaire contre ce projet, il va être rejeté», a déclaré M. Ponta à l'issue d'une réunion au Parlement.

Développé par la compagnie canadienne Gabriel Resources  [[|ticker sym='T.GBU'|]], à travers sa filiale Rosia Montana Gold Corporation, le projet nécessiterait l'utilisation d'environ 12 000 tonnes de cyanure par an, menaçant, selon des archéologues, des galeries minières de l'époque romaine.

La compagnie promet des centaines d'emplois et le respect des normes environnementales.

Réagissant aux «informations de presse» sur le revirement du gouvernement, Gabriel Resources a indiqué que «si le projet de loi était rejeté, la compagnie analyserait toutes les voies de recours possibles (...) y compris une action en justice pour violations multiples des traités internationaux sur les investissements».

Les propos-surprise de M. Ponta sont intervenus peu après que le président du Sénat Crin Antonescu, coprésident, comme lui-même, de la coalition de centre gauche au pouvoir, l'USL, eut déclaré que le projet de loi devait être soit retiré par le gouvernement soir rejeté par les élus.

M. Antonescu avait notamment fait référence à l'opposition croissante de l'opinion publique.

Dimanche, plus de 15.000 Roumains, en majorité des jeunes, ont défilé des heures durant dans les grandes villes du pays pour réclamer le retrait de ce projet de loi contesté ainsi que l'abandon pur et simple des plans prévoyant la création de la plus grande mine d'or à ciel ouvert d'Europe à Rosia Montana, un village de Transylvanie.

«Du moment qu'il y a une majorité claire contre ce projet, il n'y a pas de raison de faire traîner les choses. Donc allons au Sénat et mettons fin au projet (de loi) le plus rapidement possible. Le Sénat peut l'examiner en procédure d'urgence puis il l'envoie à la Chambre des députés qui le rejette aussi et avec ça basta!», a ajouté le premier ministre.

Bien qu'il ait promis de bloquer l'exploitation d'or à base de cyanure à Rosia Montana lorsqu'il faisait campagne, le gouvernement de M. Ponta avait adopté à la surprise générale fin août un projet de loi facilitant les expropriations et l'obtention des permis nécessaires pour cette mine controversée.

Le premier ministre avait par la suite semé la confusion et suscité les railleries en annonçant qu'en tant que député il allait voter contre ce projet de loi.

Les opposants au projet ont salué lundi une «victoire», «notamment pour les jeunes manifestants des grandes villes non affiliés à des partis politiques», selon Alina Mungiu, présidente de l'ONG de lutte contre la corruption Alliance pour une Roumanie propre.

Mais le projet n'est pas enterré, soulignent-ils.

«Il s'agit bien d'une victoire mais elle intervient au cours d'une guerre qui dure depuis plus de 10 ans et où nous avons déjà vécu des moments où nous pensions avoir gagné», a déclaré à l'AFP Mircea Toma, président de l'association de défense de l'État de droit Active Watch.

«Pour l'instant nous avons affaire à de simples déclarations d'hommes politiques, or le risque existe que le projet soit remis sur la table plus tard», a-t-il souligné.

Le sort de la mine dépend dans l'immédiat de la ministre de l'Environnement Rovana Plumb dont le ministère est appelé à donner un avis crucial concernant l'impact sur l'environnement, en l'absence duquel le projet restera bloqué.