Manifestations, émeutes, violences. En Afrique comme en Amérique du Sud, d'importants conflits miniers ont récemment vu le jour. Comment gérer ces affrontements, et surtout prévenir leur apparition ? Des chercheurs s'étant penchés sur la question semblent unanimes : les entreprises gagnent à instaurer un dialogue et à se faire proactives.

«Les conflits miniers et les coûts qui y sont associés sont à la hausse, l'industrie doit donc prendre la situation très au sérieux ", tranche la chercheuse Marketa Evans, titulaire d'un doctorat en études internationales.

«On parle de millions, voire de milliards de dollars qui sont en jeu ", ajoute-t-elle.

La problématique de la gestion des conflits dans l'industrie minière a été abordée par plusieurs chercheurs lors d'une conférence au Congrès minier mondial (CMM) hier, au Palais des congrès de Montréal.

Selon Marketa Evans, les conflits sociaux s'enveniment s'ils ne sont pas désamorcés à temps. Ces conflits font alors en sorte que les entreprises minières doivent engloutir des sommes astronomiques en argent, en temps et en ressources humaines pour les régler.

«Il faut aussi réaliser que les investisseurs sont de plus sensibles à ces questions ", affirme Gary MacDonald, directeur et cofondateur de Monkey Forest Consulting, qui conseille les entreprises oeuvrant notamment dans le secteur minier.

Parmi les exemples de conflits importants, on compte le Zimbabwe, où le diamant de Marange est exploité. Mentionnons également la Zambie et ses gisements de cuivre. Dans ces deux pays, des violences ont fait rage en lien avec l'exploitation minière, selon des rapports de Human Rights Watch, notamment.

Une tâche complexe

La tâche n'est toutefois pas simple. Les conflits dans le secteur minier sont variés et peuvent émaner de questions environnementales. Les litiges peuvent aussi impliquer des questions territoriales, culturelles ou des conditions de travail. Il arrive également qu'une entreprise étrangère ne soit pas consciente des enjeux locaux.

Une recherche menée de 2005 à 2012 estime par ailleurs que 80 % des conflits rapportés dans l'industrie minière seraient liés à l'exploitation des métaux précieux. Près de la moitié des conflits seraient liés à l'exploitation de l'or, tandis que l'exploitation de diamants était davantage rattachée aux guerres civiles.

«Plusieurs facteurs externes peuvent aussi entrer en ligne de compte et engendrer des problématiques ", affirme Philipp Kirsch, l'un des auteurs de cette étude du Minerals Industry Safety and Health Centre.

Des pistes de solution

Les entreprises doivent dialoguer et faire preuve d'un maximum de transparence pour instaurer dès le départ un climat de confiance avec les populations, selon la chercheuse Marketa Evans. Une tierce partie peut aussi favoriser le dialogue entre les parties.

Au Canada, par exemple, des organismes comme le Bureau du conseiller en responsabilité sociale des entreprises (RSE) de l'industrie extractive ont été créés afin de permettre aux personnes ayant des opinions et des intérêts différents de collaborer pour trouver des solutions mutuellement acceptables.

Selon cette chercheuse, les recours juridiques ou le lobbying ne peuvent plus suffire à régler d'éventuels différends. Les conflits qui ne sont pas réglés peuvent être particulièrement imprévisibles et évoluer rapidement, estime-t-elle. " L'internet et les réseaux sociaux ont changé la façon dont les entreprises doivent désormais répondre et interagir avec les communautés ", dit Marketa Evans.

Les entreprises doivent ainsi prendre les devants et désamorcer les conflits avant qu'ils ne surviennent. " Il peut être tentant de mettre de côté cette question et d'attendre que les problèmes se manifestent, explique Marketa Evans. Mais il faut changer cette façon de faire et comprendre qu'à long terme, la prévention et la gestion de conflits sont payantes, et ce, pour toutes les parties. »