Malgré l'embellie du secteur, General Electric (GE) fait marche arrière dans l'énergie solaire deux ans après y avoir annoncé des investissements massifs, ayant pris trop de retard dans la course aux baisses de coûts.

En avril 2011, le conglomérat industriel américain avait annoncé en grandes pompes qu'il allait investir 600 millions de dollars dans le solaire et construire «la plus grande usine de panneaux photovoltaïques aux États-Unis» pour capitaliser sur son rachat de PrimeStar Solar, société établie dans le Colorado.

Un an plus tard, face à la chute mondiale des prix en raison d'une très forte concurrence des fabricants chinois, GE avait abandonné le projet d'usine.

Il a décidé depuis de jeter définitivement l'éponge et a annoncé mardi la revente à l'américain First Solar, premier fabricant américain et deuxième mondial, de ses brevets pour des technologies permettant de produire des panneaux solaires reposant sur un film fin en tellurure de cadmium.

«Nous avons décidé de ne pas poursuivre» le projet de fabriquer des panneaux solaires vu la chute de 50% des prix et la surcapacité» du secteur, a expliqué à l'AFP une porte-parole de GE, Lindsey Theale.

Le bureau hérité de PrimeStar dans le Colorado va être fermé avec 50 emplois touchés, a précisé Mme Theale.

«Nous allons nous focaliser sur les systèmes annexes», notamment les convertisseurs d'énergie photovoltaïque en énergie électrique fabriqués en France par la filiale Converteam, a-t-elle ajouté.

Contre ses brevets, GE va obtenir des actions qui représentent près de 2% de First Solar, soit une valeur de 82 millions de dollars au cours de clôture de mardi. Il conserve aussi des investissements directs dans plusieurs projets solaires dans le monde.

Difficile de se faire une place

Paradoxalement, le géant industriel jette l'éponge au moment où le marché va mieux.

«Les fondamentaux s'améliorent beaucoup», remarque Angelo Zino, analyste de S&P Capital IQ.

Les prix se sont stabilisés à la fois à cause d'une hausse de la demande de la Chine et du Japon, qui dans la foulée de la catastrophe de Fukushima réduit sa production d'électricité nucléaire et développe ses énergies renouvelables.

«Le Japon représente désormais 20% du marché du solaire mondial contre seulement 8%» il y a deux ans, remarque Steve Simko, analyste de la maison de recherche Morningstar.

Il estime toutefois que la demande nippone, tirée par des subventions gouvernementales, pourrait retomber brutalement.

«Nous avons déjà eu plusieurs bulles», tirées par un pays puis l'autre, remarque M. Simko.

Autre facteur positif, le marché s'est consolidé alors que de nombreuses sociétés trop petites ou pas assez compétitives face à la concurrence chinoise ont mis la clé sous la porte. C'est notamment le cas de Solyndra, qui avait été largement subventionnée par l'administration Obama, et qui a fait faillite en 2011.

«Le secteur est arrivé à un point où il comporte 8 à 10 acteurs de large échelle» à l'instar de First Solar et Sunpower aux États-Unis, de groupes chinois en tête desquels Suntech, ou encore de Sharp au Japon, «et cela devient difficile de se faire une place sur le marché», remarque Angelo Zino.

«GE a la même technologie que First Solar» et parvient en laboratoire à fabriquer des panneaux solaires générant plus d'énergie «mais avec des coûts de production beaucoup plus élevés». Ils ne sont donc pas compétitifs sur ce marché ultra-concurrentiel, poursuit Steve Simko.

Par ailleurs, l'accalmie dans la guerre commerciale participe à la stabilisation du marché. Les États-Unis avaient annoncé des taxes dissuasives sur des produits chinois accusés de dumping sur les panneaux solaires.»Ça n'a pas empêché les produits chinois d'entrer aux États-Unis, mais ça a aidé les autres fabricants asiatiques, et cela a aidé à créer un plancher pour les prix, qui se sont stabilisés ces derniers trimestres», estime M. Zino.

L'Union européenne a à son tour annoncé des mesures face aux fabricants chinois: un prix plancher et un plafond aux importations en provenance de Chine, avec la menace d'une taxe à 47% si ces limites sont dépassées.