Pour sauver la face, le gouvernement péquiste prépare un régime de redevances complexe qui paraît remplir ses promesses électorales tout en les diluant de façon importante pour essayer de ne pas trop nuire aux investissements miniers.

Depuis le début de l'année, les investissements miniers ont diminué de 700 millions; un premier recul en 10 ans. Ce recul s'explique par la baisse du prix des métaux, mais aussi par l'incertitude créée par les promesses péquistes, selon ce qu'a rapporté, entre autres, Dundee Marchés des capitaux.

La Presse a obtenu une copie du dernier scénario soumis par le gouvernement à l'industrie. En campagne électorale, le Parti québécois promettait de récolter en moyenne près de 390 millions de plus par année en redevances. Soit deux fois plus que le niveau actuel. Tout porte à croire que ce sera beaucoup moins sur papier. Et c'est sans prendre en considération les projets annulés ou ralentis dans les derniers mois, comme celui de 900 millions d'ArcelorMittal à Port-Cartier, la fin de l'expansion de la mine au lac Bloom de Cliff Natural Resources ou la fermeture de la mine Kiena de Wesdome à Val-d'Or.

On y propose encore un régime hybride pour que chaque société minière verse une redevance minimale et paie plus lors des booms miniers. Mais on ajoute plusieurs paramètres pour en atténuer l'impact.

«Différents scénarios sont encore à l'étude. On en commentera un seul, celui qui sera choisi, lors de l'annonce», a répondu Mélanie Malenfant, attachée de presse du ministre des Finances, Nicolas Marceau.

Dans le dernier scénario à l'étude, un virage important est proposé. On ne propose plus de redevance plancher de 5% sur la valeur brute. On introduit plutôt le concept de valeur de minerai à la tête du puits (VTP). Il s'agit de la valeur brute, de laquelle on soustrait plusieurs frais, comme le traitement, la manutention, l'administration et la commercialisation.

Calculs complexes

Même après ces déductions, le taux serait inférieur à ce qui était promis. On propose 1% pour la première tranche de 75 millions de minerai extrait. C'est seulement pour la valeur extraite qui excède cette somme que le taux de 5% s'appliquera. On vise ainsi à ne pas trop affecter les petits projets, souvent réalisés par des socoiétés minières québécoises.

Le même recul s'observe pour les mesures devant permettre de profiter davantage des booms miniers. Techniquement, il y aura encore une surtaxe de 30% sur ce que le PQ appelait le «surprofit». Mais elle serait très rarement appliquée, selon le nouveau scénario. Elle ne s'appliquerait qu'aux rendements pharaoniques, de 50 à 100%.

Dans le scénario consulté, le gouvernement change de lexique. Il parle désormais de marge bénéficiaire, soit le profit divisé par la valeur brute. Cela donne le rendement. La taxe varie selon le niveau de rendement. Pour une marge très intéressante de 0 à 35%, la taxe serait de 16%. Le taux de taxation varie avec celui du rendement, pour atteindre 30% aux rendements rarement atteints du sommet de l'échelle.

Autre nouveauté: en campagne électorale comme lors du Forum organisé en mars, les péquistes voulaient que la redevance sur la valeur brute et la taxe sur le surprofit s'additionnent. Ce ne serait plus forcément le cas. Les entreprises minières ne paieraient que la somme la plus élevée des deux.

Autre mesure offerte: si la redevance de base VTP est plus élevée que la taxe sur le rendement, on permet à la minière de prendre une partie de la différence et de la placer dans un fonds spécial. C'est donc quand elles en auront les moyens qu'elles redonneront plus à l'État.

Étant donné la complexité du régime, certaines minières ne sont pas encore capables de chiffrer combien elles paieront de plus. Selon nos informations, on ira chercher un peu plus dans les poches des grosses minières comme Rio Tinto, sans que ces hausses soient prohibitives.

Le gouvernement Marois a réservé une salle à Chibougamau le 29 avril. Il doit y faire une annonce sur le Secrétariat du développement nordique. Le gouvernement aimerait y présenter le nouveau régime de redevances. Mais on ignore s'il sera prêt.

La ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet, a toutefois indiqué mardi à Québec qu'elle souhaitait prendre son temps pour trouver la bonne solution, même si l'industrie s'impatiente.