Le titre de la société minière Semafo a sombré de 75% depuis deux ans. La descente a culminé l'été dernier avecle départ du président et chef de la direction, Benoit La Salle, et son remplacement par son bras droit depuis plusieurs années, Benoit Desormeaux. En entrevue avec La Presse Affaires, les deux hommes proposent leurs explications du recul boursier de la société montréalaise.

Les risques de l'Afrique

«En 2010, l'Afrique était devenue une plateforme d'investissement sans risque, soutient Benoit La Salle. Une mine en Afrique était valorisée de la même façon en Ontario et au Québec.» Au tournant de 2011, les balbutiements du Printemps arabe ont vite fait réaliser aux investisseurs qu'il y avait un risque politique réel en Afrique. Les soubresauts ont touché le Burkina Faso, où se trouve Mana, la propriété phare de Semafo.

L'attrait des lingots

Selon les dirigeants de Semafo, plusieurs investisseurs, échaudés par les problèmes opérationnels de plusieurs sociétés ou inquiets des risques politiques, se sont tournés vers l'or physique. M. La Salle confirme que les fonds négociés en Bourse (FNB) constitués d'or physique ont fait très mal aux sociétés minières. M. Desormeaux dit prendre acte de ce glissement et s'engage à mettre davantage l'accent sur la performance opérationnelle de Semafo, incluant «des révisions de processus et des optimisations».

À 500 000 onces, pas de party

Semafo ne traîne pas de dette et aurait pu se permettre une acquisition, notamment en 2010, quand la valeur de son titre a triplé. La société confirme avoir regardé des projets, mais s'est refusée à payer trop cher simplement pour augmenter sa production, explique Benoit Desormeaux. «Les gens qui mettaient l'accent sur la production nous ont dit d'acheter telle ou telle mine pour atteindre les 500 000 onces par année. Mais qu'est-ce qui se passe à 500 000 onces, y a-t-il quelque chose de spécial, un party dont je ne suis pas au courant? Non, il ne se passe rien.» Selon M. Desormeaux, l'important n'est pas la production en tant que telle, mais plutôt de générer des flux de trésorerie.

L'expansion en attente

La publication d'une mise à jour des travaux à Mana, le 11 juillet 2012, a précipité le départ de Benoit La Salle. Parmi les nouvelles, Semafo annonçait que l'or découvert dans un secteur de la propriété représentait certains défis métallurgiques. La société n'avait pas non plus d'expansion de capacité à annoncer, ce qui a déçu des investisseurs. «On a besoin de plus de temps pour savoir exactement quelle expansion on veut», soutient Benoit Desormeaux. Un mois plus tard, après avoir atteint le creux en Bourse, Semafo a annoncé le changement à la direction. «La relève était prête, et on s'est dit que c'était le meilleur temps, dit Benoit La Salle, aujourd'hui vice-président du conseil de Semafo et président de Semafo Énergie. Le marché voulait des changements.»

Plus prudent

Après un troisième trimestre plus difficile, avec des profits en baisse de 70%, les analystes et investisseurs attendent le détail du plan d'expansion de la mine Mana, quelque part en 2013. Car c'est avant tout par Mana que passe la croissance de Semafo, aux yeux de M. Desormeaux.

Il ajoute que la société sera plus «conservatrice» à l'avenir. «On va créer la croissance quand ce sera possible» et «annoncer notre expansion quand on va être prêts».

Des 18 analystes recensés par Bloomberg, 14 recommandent l'achat du titre, trois suggèrent de le conserver et un, de le vendre. La cible moyenne est à 5,72$.

SEMAFO en bref

Siège: Montréal

Mines: Une mine principale au Burkina Faso, deux autres mines au Niger et en Guinée

Résultats/neuf premiers mois de 2012: 173 700 onces produites (baisse de 6%), bénéfice net de 55,5 millions (baisse de 31%)

Titre: SMF (Toronto), 3,38$, sommet de 14,11 le 6 décembre 2010

Capitalisation boursière: 923 millions de dollars