Une entreprise de Montréal, Gradek Energy, soutient avoir mis au point une technologie capable de remédier aux énormes dégâts environnementaux causés par l'exploitation des sables bitumineux en Alberta.

Après plus de 15 ans de recherche et près de 20 millions de dollars d'investissements, cette entreprise québécoise a conçu une bille de polymère organique de la taille d'un gros raisin qui permettrait de nettoyer les bassins de décantation - ces immenses lacs de déchets créés au moment d'extraire le bitume des sables bitumineux.

L'utilisation de ces petites billes par dizaines de milliers permettrait de récupérer le bitume des bassins, de recouvrer les minéraux utiles et ensuite de réutiliser l'eau décontaminée devenue chaude pour extraire d'autre bitume des sables bitumineux.

Tests

Gradek Energy a déjà testé cette nouvelle technologie sur les déchets de Syncrude Canada au cours des derniers mois. Les ingénieurs de Syncrude sont en train d'évaluer les données des tests réalisés jusqu'ici. Mais les résultats semblent si concluants que cet acteur important de l'industrie des sables bitumineux pourrait conclure avec Gradek Energy d'ici quelques semaines une entente de commercialisation pour entreprendre la dépollution des bassins de décantation dont il a la responsabilité.

«Le pétrole le plus vert»

«Cette technologie va faire des sables bitumineux le pétrole le plus vert de la planète», a soutenu sans ambages Thomas Gradek, président de Gradek Energy, dans une entrevue à La Presse.

Syncrude Canada est l'une des trois grandes entreprises, avec Suncor et Shell Canada, à exploiter les sables bitumineux de l'Athabasca, dans le nord de l'Alberta. Cette industrie en pleine expansion est fortement critiquée par les groupes environnementalistes et certains pays européens en raison des dommages qu'elle cause à l'environnement et des émissions de gaz à effet de serre qu'elle produit.

«Nous suivons les règles de la nature, sans réaction chimique. C'est comme du velcro. Le bitume colle sur les billes et reste dessus jusqu'à ce qu'il soit récupéré. Nous sommes en mesure d'extraire plus de 98,5% du bitume de cette manière. En 20 minutes, l'eau est aussi claire que l'eau qui est filtrée. Et nous pouvons ensuite recycler l'eau immédiatement pour extraire d'autre bitume, parce que l'eau est chaude et qu'il faut de l'eau chaude pour l'extraire des sables», a ajouté M. Gradek.

M. Gradek s'est rendu en Alberta pour rencontrer les dirigeants de Syncrude et les représentants du gouvernement albertain il y a trois ans et demi dans le cadre d'une mission du gouvernement du Québec sur l'énergie, dirigée par le regretté ministre des Ressources naturelles Claude Béchard. Il a procédé à un test devant trois ministres et un sous-ministre du gouvernement albertain.

«J'ai eu la chance de sensibiliser les dirigeants du gouvernement albertain au sujet de cette technologie», a dit M. Gradek.

Une décennie

Selon les estimations de M. Gradek, les bassins de décantation existants de l'Alberta pourraient être complètement nettoyés sur une période de 10 ans en utilisant ces fameuses billes, qui peuvent être utilisées environ 500 fois. Si tout fonctionne comme prévu, il prévoit entreprendre la construction d'une première usine modulaire pour nettoyer les bassins de décantation au début de la nouvelle année. Ces bassins contiennent aujourd'hui plus de 300 millions de barils de pétrole.

Cette technologie pourrait aussi être utilisée lors des déversements de pétrole. Le Centre d'étude maritime de l'Université du Québec à Rimouski a d'ailleurs fait des tests avec cette nouvelle technologie en simulant un déversement en eau froide et salée. «Le résultat a été impressionnant. Cela fonctionne en quelques secondes. L'huile s'est collée sur les billes dès qu'elles ont été déposées», a dit M. Gradek.

«Je suis un passionné de l'environnement. Je veux léguer un meilleur environnement à mes enfants et aux générations futures», a dit M. Gradek. Cet ingénieur de formation a participé aux opérations de nettoyage des dégâts causés par les incendies de puits de pétrole au Koweït au début des années 90 après le retrait des troupes irakiennes de Saddam Hussein.

M. Gradek prévoit faire une démonstration de l'efficacité de sa nouvelle technologie devant les médias à la fin du mois de septembre. «Les sceptiques seront confondus», a-t-il lancé.