Assis dans son salon, Angelo Poirier a une superbe vue à 180 degrés sur le fleuve Saint-Laurent. S'il le veut, il peut même voir ce que les passagers des bateaux de croisière ont dans leur assiette, tellement les navires passent près de la limite de son terrain.

Dans le coin gauche de cette vue à 1 million de dollars, la centrale nucléaire de Gentilly-2 fait comme une tache. Le jour, c'est de là qu'on la voit le mieux. La nuit, elle brille comme un arbre de Noël.

«C'est sûr que si elle n'était pas là, on aimerait mieux ça», dit le résidant de Champlain, le village situé directement en face de la centrale, de l'autre côté du fleuve.

Angelo Poirier vit pourtant bien avec sa voisine controversée d'en face. La centrale était là lorsqu'il a acheté la maison, il y a 12 ans.

Il a été question de la fermer, puis de la rénover et aujourd'hui, on ne sait plus trop ce que le gouvernement québécois a l'intention de faire avec sa seule centrale nucléaire.

Depuis le désastre de Fukushima, l'opinion publique, au Québec, penche en faveur de la fermeture de la centrale. Mais dans la région, c'est plutôt l'inverse. Malgré les scénarios apocalyptiques brandis par ceux qui veulent que le Québec sorte du nucléaire, 56% de la population locale veut garder la centrale, selon un sondage réalisé par la firme Segma-Recherche en avril 2011 pour le quotidien Le Nouvelliste.

«C'est un gros plus pour la région», dit Claudette Roy, résidante de Gentilly, un des six villages fusionnés pour former la ville de Bécancour. Le magasin de meubles qu'exploite Mme Roy dans la rue principale ne profite pas vraiment des retombées économiques de la centrale et de ses 800 employés, selon elle. «La plupart de ceux qui travaillent là habitent à Trois-Rivières», explique-t-elle.

Malgré cela, elle estime que fermer la centrale serait une grosse perte pour l'économie locale. La question de la sécurité n'a jamais inquiété Claudette Roy. «La centrale est là depuis 30 ans et on n'a jamais eu de problèmes.»

Comme tous les résidants qui habitent dans un rayon de huit kilomètres de Gentilly-2, Angelo Poirier a chez lui des pilules d'iode à prendre en cas d'accident. Mais ce qui l'inquiète encore plus que les risques d'accident, c'est le coût associé à la réfection de la centrale. «Ça va coûter ben cher», dit-il.