L'intérêt du géant de l'aluminium russe Rusal pour la technologie d'Orbite Aluminae et son gisement d'argile en Gaspésie trouve une nouvelle explication. Le numéro un mondial de l'industrie songe à construire une aluminerie sur la Côte-Nord, et il pourrait bien l'alimenter avec l'alumine produite par Orbite.

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Le président et chef de la direction d'Orbite, Richard Boudreault, nourrit de grandes attentes dans la jeune alliance avec Rusal, conclue à la fin mars. En entrevue avec La Presse Affaires au siège social de l'arrondissement de Saint-Laurent, il s'emballe à parler du plan de match rapide et ambitieux d'Orbite, après six mois passés sur la défensive.

Une enquête de l'Autorité des marchés financiers (AMF) a forcé l'arrêt des transactions sur le titre pendant six semaines, puis un analyste a publié un rapport fracassant qui remettait en cause la technologie d'Orbite.

C'est pendant l'arrêt des transactions qu'Orbite a conclu un protocole d'entente avec Rusal pour la construction d'une usine d'alumine métallurgique produite à partir des argiles de Grande-Vallée, en Gaspésie.

«La prochaine étape pour Rusal est de s'impliquer avec nous pour l'usine d'alumine, puis ils vont prendre une entente d'approvisionnement pour nourrir la nouvelle aluminerie qu'ils aimeraient positionner au Québec», se réjouit Richard Boudreault.

Rusal a inscrit le lobbyiste Amar Leclair-Ghosh au registre officiel de la province, a révélé la semaine dernière la station TVA Est-du-Québec. Le lobbyiste souhaite obtenir des informations et le cadre légal et réglementaire pour l'implantation d'une aluminerie sur la Côte-Nord.

Il veut également connaître «la disponibilité de ressources nécessaires à l'exploitation d'une aluminerie de grande taille, notamment en matière d'énergie», et «le type d'aide financière disponible».

Même si rien n'est encore confirmé, «c'est une grande nouvelle pour le Québec», affirme Richard Boudreault. Selon lui, Orbite a contribué à amener Rusal au Québec.

Le test de l'AMF

Orbite estime que son projet d'usine d'alumine métallurgique a une valeur actuelle nette avant impôts de 4,7 à 7,7 milliards, sur 25 ans - basé sur les prix élevés d'août 2011. Elle ambitionne de construire une dizaine d'usines du genre au Québec.

Son procédé lui permettrait de produire non seulement de l'alumine, mais du fer, du scandium, du gallium et des terres rares. C'est notamment sur cette question des terres rares que l'Autorité des marchés financiers a remis en doute l'évaluation économique préliminaire (ÉÉP) déposée en janvier par Orbite.

L'AMF a imposé à Orbite un arrêt des transactions, une vérification indépendante de l'étude, puis la préparation d'une étude révisée.

C'était une période très difficile qui a ébranlé l'équipe par moments, concède Richard Boudreault. Finalement, la vérification a décelé certaines lacunes dans l'étude initiale, mais pas d'erreur majeure sur le calcul des ressources ou les conclusions économiques.

«C'est un test très dur, très exigeant. On l'a passé, on va passer à la prochaine étape», dit maintenant M. Boudreault.

Brouille avec un analyste

Quelques jours après le retour de l'action en Bourse, le 5 avril, l'analyste Jon Hykawy, de Byron Capital Markets, a publié un rapport qui a fait des vagues, et dans lequel il recommandait la vente du titre.

Dans ce rapport et les trois autres publiés depuis, M. Hykawy remet en question l'efficacité de certaines parties du processus de production d'Orbite et soutient que le risque technologique est grand.

Richard Boudreault rejette d'un revers de main les analyses de M. Hykawy. Il accuse l'analyste de ne pas avoir fait les vérifications nécessaires avant de publier ses rapports.

«On ne le considère pas comme un analyste, il n'est pas sérieux.»

M. Boudreault souligne qu'Orbite a fait parvenir des mises en demeure à M. Hykawy «pour le mettre dans le droit chemin».

«Nous, on est certain de ce qu'on avance, on est certain de notre technologie. Rusal a fait sa vérification diligente correctement.»

Orbite compte démarrer dans quelques mois une petite usine d'alumine de haute pureté, qui ne peut pas être utilisée pour l'aluminium, mais qui générera des revenus de plus de 100 millions par année, soutient Richard Boudreault. Cela permettra à Orbite d'accumuler quelques sous pour la construction de la première usine d'alumine métallurgique, au coût de 500 millions.

Rusal fournira sa part, tandis que la moitié de l'investissement proviendra de financement par prêts. Orbite a récemment décuplé sa superficie de titres miniers en achetant des propriétés de la Gaspésie jusqu'à Rivière-du-Loup.

Le titre d'Orbite se négociait à 1,66$ vendredi à la Bourse de Toronto. Il dépassait les 3$ au mois de janvier.