Le Québec est en train de gaspiller une occasion unique d'établir une industrie locale de transformation du diamant, affirme le directeur général de la Bourse du diamant du Canada.

Le gouvernement du Québec n'a pas l'intention d'imiter l'Ontario et les Territoires du Nord-Ouest et de forcer Stornoway Diamond, qui lancera la mine Renard en 2016, à réserver une «allocation» de 10% de ses diamants pour des tailleries locales.

«Si vous [les Québécois] n'obtenez rien [pour la transformation], c'est une honte, lance Adam Shubinsky, joint aux bureaux torontois de la Bourse du diamant, qui est à la fois un lieu de commerce et une association de l'industrie. Le gouvernement met un paquet d'argent pour aider Stornoway à vendre des diamants, notamment en construisant une route qui se rend à la mine. Le gouvernement du Québec a une obligation morale de s'assurer que les intérêts économiques du Québec à long terme soient favorisés, pas seulement les intérêts à court terme d'une société.»

Adam Shubinsky souligne que c'est le système d'allocation de pierres de bonne qualité imposé par le gouvernement ontarien qui assure «le formidable succès de la taillerie de Sudbury», qui reçoit certains des meilleurs diamants de la mine Victor. Plus la valeur d'un diamant est élevée, moins la différence de coûts de main-d'oeuvre entre l'Inde et le Canada a un impact.

Pierre Leblanc, de Canadian Diamonds Consultants, soutient que l'allocation est «fort probablement un élément essentiel pour avoir une taillerie» qui fonctionne au Québec.

Si le gouvernement ne force pas la main du producteur, cela rendra très difficile l'accès de la taillerie aux diamants bruts québécois de bonne qualité, note M. Leblanc. Sans cela, la taillerie doit passer par le marché d'Anvers, à un coût plus élevé qui grugera ses faibles marges de profit.

«Une taillerie au Québec peut difficilement survivre s'il n'y a pas de diamants produits au Québec qui lui sont fournis», dit aussi Marie-José Girard, présidente de la société d'exploration Dios et membre du conseil d'administration du Centre canadien de valorisation du diamant, à Matane.

Ce n'est pas Stornoway qui insistera. Car un tel système peut amputer légèrement les profits, explique Adam Shubinsky. En réservant certaines de ses plus belles pierres à la vente locale, même au prix du marché, cela diminue la valeur des lots de pierres vendus à Anvers.

Une seule autre option

Selon M. Shubinsky, une seule autre option est envisageable pour qu'une taillerie survive au Québec: que Stornoway établisse un réseau de distribution proprement canadien, sans passer par Anvers.

Selon M. Shubinsky, les sociétés indiennes, qui dominent le marché mondial de la taille, n'hésiteraient pas à s'approvisionner ici et à transformer ici les pierres de plus grande valeur, tout en expédiant les autres pierres en Inde. Il y a de la valeur ajoutée à un diamant de qualité miné, taillé et poli au Canada, ou plus précisément au Québec.

Pour l'instant, l'étude de faisabilité du projet Renard repose sur la vente des diamants par l'entremise d'Anvers. Et Québec a indiqué cette semaine qu'il n'imposera pas de système d'allocation à Stornoway.

Le président et chef de la direction de Stornoway Diamond Corporation, Matt Manson, refuse de commenter tout ce qui a trait à la transformation et à la commercialisation des pierres qui sortiront de Renard. Trop tôt pour en discuter, dit-il, parce que la société est entièrement concentrée sur le financement et la construction de la mine.

Investissement Québec détient une participation de 37% dans Stornoway, de Vancouver.