Les grands projets d'investissement privés, dans une très large part relatifs aux ressources naturelles, totalisent plus de 32 milliards de dollars au Québec. Cela représente 11% de la valeur de tous les superprojets industriels du pays, révèlent des données compilées par la firme de recherche E&B Data et que La Presse Affaires a pu consulter en exclusivité.

Si le Québec est loin d'avoir une part des investissements représentative de son poids démographique dans le Canada (environ 23%), il faut en attribuer la faute aux hydrocarbures. Le secteur gazier et pétrolier, incluant les projets de pipeline, accapare presque 70% de la valeur totale des projets d'envergure au Canada.

Le Canada compte 100 projets privés d'une valeur de plus de 1 milliard chacun, pour une valeur combinée de plus de 284 milliards de dollars. E&B Data exclut de l'analyse les projets publics, dont les projets énergétiques et d'infrastructures.

Le secteur minier représente 26% des investissements, auquel il faut ajouter un maigre 5% pour la première transformation des métaux. C'est donc dire que la presque totalité des superprojets est l'affaire des ressources naturelles.

Mieux que l'Ontario

Le Québec compte 15 projets de plus de 1 milliard, incluant ceux d'Alouette et d'Alcoa, annoncés tout récemment. Dans la liste apparaissent aussi les projets dans le secteur du fer (Cliffs, ArcelorMittal, Tata Steelet New Millenium, Adriana), de même que la construction de la mine d'or de Goldcorp en Baie-James et le projet Royal Nickel, en Abitibi.

Certes, le Québec (11% de la valeur des projets) accuse un retard par rapport à l'Alberta (46%), et même par rapport au Yukon et aux Territoires-du-Nord-Ouest (13% à eux deux), mais on peut se consoler en jetant un oeil de l'autre côté de la rivière des Outaouais. L'Ontario ne compte que sept projets de plus de 1 milliard, pour seulement 3% du total des investissements. L'Ontario, en dépit de son potentiel géologique intéressant, traîne la patte sur le plan des grands projets miniers. Les généreux incitatifs du Québec en matière d'exploration et la documentation géologique étoffée de la province semblent porter leurs fruits, avance le président d'E&B Data, Jean Matuszewski.

Selon l'Institut Fraser, le Québec vient au quatrième rang des juridictions les plus attrayantes en matière de politiques minières. L'Ontario vient au 18e rang.

Plan Nord

À la lumière du portrait dressé par les données d'E&B, Jean Matuszewski espère qu'on pourra jeter un nouveau regard «à ce que les gouvernements font pour attirer les investissements et maximiser les retombées».

À ce chapitre, le Plan Nord n'a pas encore modifié la position relative du Québec dans le paysage canadien de l'investissement privé. Entre 2001 et 2010, la proportion de la valeur des grands investissements privés au Québec était également de 11%.

E&B Data se promet maintenant de faire un suivi constant du portrait des grands projets d'investissement au Canada. On verra mieux si le Plan Nord modifie la donne.

150 000 emplois

L'ensemble des 100 projets recensés par E&B Data, d'une durée de vie médiane de 15 à 20 ans, généreraient 50 000 emplois permanents et nécessiteraient 100 000 travailleurs de construction sur une décennie.

C'est à la fois une bonne nouvelle et un obstacle majeur. Jean Matuszewski craint que l'industrie de la construction ne puisse fournir suffisamment de travailleurs qualifiés pour tous ces grands projets.

Au Québec, il y aura une compétition pour les ressources humaines avec les milliards de dollars de chantiers publics et les grands projets des autres provinces. Tant et si bien que le défi de la main-d'oeuvre pourrait remettre en question certains de ces projets, qui ne sont pas tous coulés dans le béton.