Quand il a été embauché par Junex (V.JNX) en Gaspésie, en 2003, François Corriveau a découvert tout un monde. Et une passion. Il a gravi peu à peu les échelons de ce nouveau métier avant de fonder sa propre entreprise de services pour l'industrie gazière, qui travaille aujourd'hui pour Talisman (T.TLM) en Colombie-Britannique

Ce n'est pas son choix. «J'aimerais mieux travailler au Québec, mais, en attendant les conclusions de l'évaluation environnementale, il faut bien que je gagne ma vie», a-t-il expliqué à La Presse Affaires, en marge de la rencontre annuelle de l'Association pétrolière et gazière du Québec.

L'industrie du gaz de schiste «n'est pas le diable en personne», dit cet ancien technicien en informatique. Il se dit bien placé pour savoir que les entreprises travaillent dans le respect des règles environnementales. En Colombie-Britannique, il est responsable de la gestion de l'eau utilisée pour la fracturation. «J'ai deux jeunes enfants, je n'ai pas d'intérêt à scraper la planète», assure-t-il.

François Corriveau souhaite pouvoir revenir travailler au Québec ce printemps, si l'industrie peut recommencer à fracturer quelques puits pour recueillir des informations pour l'évaluation environnementale. Sinon, il déménagera en Colombie-Britannique avec sa famille.

Au Québec, l'industrie veut mettre à profit le délai de 24 à 30 mois que lui impose l'évaluation environnementale pour améliorer son image, ce dont elle a grand besoin. Encore hier, des manifestants attendaient les représentants de l'industrie à leur arrivée à la rencontre.

Invité à l'événement, un représentant du ministère de l'Environnement de la Pennsylvanie, John Hanger, y est allé de ses conseils. «J'estime que le refus de divulguer les produits chimiques utilisés dans la fracturation a été désastreux pour l'industrie [aux États-Unis]», a-t-il dit.

M. Hanger estime que son ministère a réussi à répondre aux préoccupations de la population avec une réglementation plus sévère, et surtout le personnel nécessaire pour faire respecter cette réglementation. Entre 2008 et 2011, le nombre d'employés affectés à ce secteur est passé de 88 à 202.

Le shale de Marcellus en Pennsylvanie compte pour 6% du gaz produit aux États-Unis et cette part continue d'augmenter. Avec l'État de New York voisin, qui devrait commencer à exploiter le gaz de schiste l'an prochain, la part de la production régionale devrait atteindre 20% du gaz produit aux États-Unis.

De son côté, le nouveau président et chef de la direction de Junex, Peter Dorrins, s'est dit confiant que le Québec dira oui à l'exploitation commerciale de pétrole et de gaz sur son territoire.

Peter Dorrins connaît bien le potentiel québécois. Il a déjà travaillé pour Shell, Amoco, BP Canada et la filiale Pétrole et Gaz d'Hydro-Québec. «Un jour, ça arrivera, j'en suis convaincu», a-t-il dit.

François Corriveau, qui fait la navette entre le Québec et le nord de la Colombie-Britannique, croit lui aussi que le Québec finira par exploiter les hydrocarbures que recèle son territoire.

«Simplement, le Québec n'a pas les moyens de s'en passer, estime-t-il. On peut essayer de le nier, mais quand on regarde le big picture, ce n'est pas beau.»