Les Montréalais ont eu la mauvaise surprise de voir le prix de l'essence bondir à près de 1,47$ le litre hier, comme un flash-back de l'été 2008. Et même si les cours du pétrole ont chuté de 5,5% sur les marchés, après une baisse de 15% la semaine dernière, les automobilistes devront prendre leur mal en patience.

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«La dernière fois que les prix du brut ont baissé, il y a eu un long délai avant que cela ne se traduise à la pompe pour les Canadiens, on parle d'environ deux mois», a souligné Emanuella Enenajor, économiste spécialisée en énergie à la CIBC, en entretien à La Presse Affaires.

Trop cher

Or, rien n'indique que la baisse des cours du pétrole perdurera dans les semaines et mois à venir. Mme Enenajor prévoit encore beaucoup de volatilité... et un été de frustration pour les vacanciers qui prendront la route. «Les gens devront avaler la pilule.»

Volatilité ou pas, le prix affiché à la pompe à Montréal est trop élevé, selon CAA-Québec. Plusieurs détaillants exigeaient 146,9 cents le litre d'essence ordinaire hier, alors que le «prix réaliste» aurait plutôt dû être de 142,7 cents, estime l'organisme de défense des automobilistes.

«La marge des détaillants est trop élevée par rapport à ce qu'elle devrait être», a dénoncé Cédric Essiminy, porte-parole du CAA.

Selon lui, les automobilistes sont «pris en otage» par les pétrolières, qui ont engrangé des profits faramineux pendant le plus récent trimestre. «L'essence est un bien essentiel, et non un bien de luxe. Des centaines de milliers de personnes ont besoin de leur véhicule pour aller travailler, reconduire les enfants à l'école...»

Cédric Essiminy recommande aux consommateurs de magasiner leur essence. Le carburant est toujours moins chez Costco et dans les stations-services situées à proximité du magasin, note-t-il. Il est aussi plus abordable à Saint-Jérôme, en banlieue nord, et à Verdun, dans l'île de Montréal, souligne-t-il.

Le site web essencemontreal.com dresse une liste des meilleurs prix en temps réel grâce aux informations fournies par des automobilistes. En après-midi, hier, il pointait vers une liste de stations-service où l'essence se détaillait entre 135 et 136,9 cents.

Petits véhicules

Malgré leur frustration, les automobilistes sont mieux préparés pour affronter la hausse des prix qu'à l'été 2008 - quand le litre avait dépassé 1,50$. La composition du parc automobile des Canadiens et des Américains a considérablement changé de visage depuis, laissant une place de plus en plus importante aux petits véhicules économes en carburant.

Les petites voitures comptent désormais pour 25% de tous les véhicules en circulation aux États-Unis, comparativement à 18% en 2007, indique l'économiste Carlos Gomes, de la Banque Scotia, dans un rapport publié cette semaine. Les ventes ont bondi de 40% au cours des deux derniers mois par rapport à mars et avril 2010.

Au Canada, les ventes de véhicules économiques ont grimpé de 23% en avril, «tout un revirement par rapport aux mois précédents où les camions et les minifourgonnettes dominaient le marché», a souligné M. Gomes.

Le prix du baril light sweet crude a reculé de 5,67$US hier sur le New York Mercantile Exchange, glissant sous le seuil psychologique des 100$US, à 98,21$US. Il a effacé tous les gains enregistrés lundi et mardi, après un recul de 15% la semaine dernière.

Les cours du brut ont chuté après la publication d'un rapport sur l'état des stocks de pétrole, qui ont augmenté de 3,8 millions de barils la semaine dernière, alors que les analystes anticipaient une hausse de 1,2 million. Les réserves d'essence raffinée ont quant à elles progressé de 1,3 million de barils, tandis qu'on attendait une baisse de 700 000.

Contrairement au Canada, où les hausses à la pompe ont été généralisées hier pour les automobilistes (jusqu'à 149,9 cents le litre dans le Nord de l'Ontario), les prix ont enregistré un recul hier aux États-Unis.