L'or a franchi mardi pour la première fois le seuil de 1450 $ l'once, dans un marché s'inquiétant des tensions géopolitiques dans le monde arabe, de la montée des prix du brut et de la crise persistante des dettes publiques européennes.

Vers 16H10, le prix de l'once d'or sur le marché au comptant s'est élevé jusqu'à 1457,45 $, du jamais vu, surpassant son précédent sommet de 1447,82 $ enregistré le 24 mars.

De son côté, l'once d'argent a grimpé jusqu'à 39,3025 $, un prix inédit depuis février 1981.

Les deux métaux ont tous deux bénéficié d'un affaiblissement de la monnaie américaine, à la suite d'un indicateur d'activité décevant aux États-Unis, un mouvement de nature à rendre plus attractifs les achats d'or et d'argent, libellés en dollars.

Le métal jaune était quant à lui particulièrement porté par la flambée persistante des prix des matières premières, et avant tout ceux du pétrole - qui sont montés à plus de 122 $ le baril mardi à Londres, leur plus haut niveau depuis août 2008.

Cette poussée des prix du brut est susceptible d'alimenter les tensions inflationnistes, contre lesquelles les métaux précieux sont habituellement considérés comme une bonne protection.

«De très forts taux d'inflation sont particulièrement bons pour l'or dans un premier temps, car les investisseurs cherchent des actifs solides», expliquaient les analystes de Standard Chartered.

«La fuite vers les actifs jugés les plus sûrs s'accélère et les inquiétudes pour les perspectives économiques s'intensifient», notaient-ils. «Alors que la croissance sera probablement mise à mal par l'envolée des prix du pétrole», l'or devrait être soutenu par «la menace persistante de l'inflation».

Face à cette menace, les propos du président de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, qui a minimisé lundi soir les craintes d'inflation aux États-Unis et affirmé qu'elles seraient passagères, n'ont pas contribué à rassurer le marché.

La poursuite d'une politique monétaire généreuse aux États-Unis continuerait de peser sur le dollar, favorisant ainsi les achats de métaux précieux.

Les tensions dans le monde arabe, le conflit en Libye et les craintes persistantes sur la solidité financière des États les plus endettés de la zone euro continuaient également d'exacerber la nervosité des investisseurs, les incitant à se reporter vers les métaux précieux.

«La crise européenne des dettes souveraines ne cesse d'empirer depuis que les Européens ont échoué fin mars à s'entendre sur une solution crédible» pour un Fonds de secours permanent au sein de la zone euro, estimaient les analystes de la banque suédoise SEB.

À la suite de ses consoeurs Fitch Ratings et Standard & Poor's, Moody's a dégradé d'un cran mardi la note du Portugal, considéré par les marchés comme le prochain candidat au Fonds de soutien européen.

Par ailleurs, «les soulèvements dans le monde arabe ne montrent aucun signe d'apaisement, avec une escalade de la guerre civile en Libye, et des situations alarmantes en Syrie, au Yémen et à Bahreïn», ce qui «profite aux métaux précieux», ajoutaient les analystes de SEB.

L'argent, de son côté, profite de son double statut de métal précieux et de métal à usage industriel, stimulé par les perspectives de reprise économique à l'échelle mondiale. Le cours du métal gris a progressé de plus de 25% depuis le début de l'année.