L'accident de la centrale japonaise de Fukushima risque de retarder le développement de l'énergie nucléaire dans le monde et de compliquer ainsi encore un peu plus la lutte contre le changement climatique, a estimé mardi le chef de l'Agence internationale de l'énergie, Nobuo Tanaka.

«Je note les craintes accrues de l'opinion publique envers le secteur nucléaire à cause des événements au Japon», a déclaré le Japonais, alors que son pays tente d'écarter une catastrophe nucléaire dans le sillage du tremblement de terre et du tsunami dévastateur de vendredi.

«Si je comprends la réaction du public, je suis préoccupé par l'effet que cela pourrait avoir sur le soutien à cette technologie vu son rôle important pour la sécurité énergétique et pour l'avènement d'une économie peu carbonée», a-t-il dit lors d'une visite à Oslo.

Selon un rapport de l'AIE datant de 2010, le développement de l'énergie nucléaire devrait représenter 6% de la solution dans les efforts visant à réduire de moitié les émissions de CO2 avant 2050, afin de limiter à 2°C la hausse globale de la température.

L'accident dans la centrale de Fukushima a relancé le débat sur le développement du nucléaire dans plusieurs pays, jetant une ombre sur la renaissance promise du secteur.

L'Allemagne a annoncé la fermeture immédiate, pour trois mois, de ses sept réacteurs nucléaires les plus anciens pour y examiner la sécurité et gelé, également pour trois mois, le sursis accordé l'an dernier aux 17 réacteurs du pays.

La Suisse a de son côté annoncé avoir suspendu ses projets de renouvellement de centrales nucléaires tandis qu'en France, où le nucléaire représente environ 75% de la production d'électricité, les écologistes réclament un référendum sur l'avenir de cette énergie.

«J'invite à la patience jusqu'à que ce que nous ayons suffisamment d'informations disponibles pour passer en revue les problèmes apparus dans la centrale japonaise afin d'en tirer des enseignements pour le rôle futur de l'énergie nucléaire», a dit M. Tanaka.

«Passer en revue prendra certainement du temps. Construire ou étendre des centrales nucléaires pourrait entraîner plus de coûts et plus de temps. Le rôle de l'option nucléaire pourrait ne pas être aussi important que nous ne le prédisions», a-t-il ajouté lors d'un point de presse.

Dans son rapport mensuel publié mardi, l'AIE estime que la consommation de pétrole du Japon pourrait augmenter de 200.000 barils par jour si la production d'électricité des 11 réacteurs nucléaires arrêtés dans l'archipel était remplacée par des centrales au fuel.

M. Tanaka a aussi dit que l'AIE était prête à puiser dans les réserves stratégiques de pétrole pour assurer l'approvisionnement du Japon qui dispose toutefois, selon lui, de stocks suffisants pour l'instant.

Fondée en 1974 dans le sillage de la crise pétrolière, l'AIE impose à ses Etats-membres -la plupart des pays industrialisés- de disposer de stocks de pétrole correspondant à au moins 90 jours d'importations nettes.