British Petroleum (BP) a franchi mardi une nouvelle étape dans sa métamorphose suite à la marée noire du golfe du Mexique, à l'origine de sa première perte annuelle en près de 20 ans, en recommençant à payer des dividendes et en lançant une restructuration d'ampleur aux États-Unis.

Sans surprise, l'exercice 2010 s'est soldé par une perte nette de 4,9 milliards de dollars pour le géant pétrolier britannique, alors qu'il avait gagné près de 14 milliards l'année précédente.

C'est la première fois depuis 1992 que ses comptes annuels plongent dans le rouge, ce qui s'explique par le coût astronomique de la marée noire provoquée l'an dernier par l'explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon, que BP exploitait dans le golfe du Mexique.

Ce désastre environnemental, le pire de l'histoire des États-Unis, a obligé le groupe à provisionner 40,9 milliards de dollars, en comptant une charge supplémentaire d'un milliard comptabilisée au quatrième trimestre.

Mais, au niveau des résultats trimestriels annoncés simultanément ce mardi, l'impact de cette catastrophe semble déjà pratiquement effacé.

BP, qui avait renoué avec les bénéfices dès le troisième trimestre 2010, après avoir perdu près de 17 milliards au deuxième -un record pour une entreprise britannique-, a gonflé ses profits d'un tiers sur les trois derniers mois de l'année écoulée par rapport à un an plus tôt.

Il a dégagé un bénéfice net de 5,57 milliards de dollars, et un bénéfice ajusté de 4,61 milliards, un peu moins que prévu par les analystes qui l'avaient estimé à 4,9 milliards, ce qui pesait sur son cours de Bourse (-1,34% à 478,38 pence -7,69$- en fin de matinée).

Parallèlement, BP poursuit le remodelage de ses activités, après avoir déjà exécuté aux deux-tiers son plan de cession de 30 milliards de dollars d'actifs.

Des actifs réduits aux États-Unis

Il a annoncé une restructuration de ses activités de raffinage aux États-Unis. En mettant en vente sa raffinerie géante de Texas City confirme sa volonté de réduire ses actifs dans un pays où il est discrédité depuis la marée noire du golfe du Mexique. Il compte réduire de moitié ses capacités de raffinage dans le pays, qui s'élèvent actuellement à près d'un million et demi de barils de pétrole brut par jour. Dans ce cadre, il va mettre en vente deux raffineries, sur les cinq qu'il possède aux États-Unis. En plus du complexe de Texas City, sur la côte texane, BP met en vente la raffinerie de Carson, en Californie, située dans l'agglomération de Los Angeles. Leur vente comprendra certaines stations-service desservies par ces infrastructures.

L'opération devrait être achevée d'ici la fin 2012, et pourrait rapporter à BP plus de 3,7 milliards de dollars, d'après le groupe.

En cédant Texas City, la plus importante raffinerie du groupe dans le monde, et l'une des plus grandes des États-Unis, avec une superficie de près de 5 km2, BP va se défaire d'un passé encombrant.

Ce gigantesque complexe, capable de traiter près d'un demi million de barils de pétrole brut par jour, avait été le théâtre en 2005 d'une explosion qui avait fait 15 morts et 170 blessés, et avait terni fortement la réputation du groupe en matière de sécurité.

Les autorités avaient mis en cause le groupe britannique et lui ont infligé plusieurs amendes pour manquements aux règles de sécurité et en matière d'environnement, dont une amende record de 87,4 millions de dollars fin 2009.

Cette restructuration confirme également la volonté du groupe de réduire le poids des États-Unis dans ses activités, après l'alliance stratégique conclue le mois dernier avec le géant du pétrole russe Rosneft, en vue d'exploiter des gisements d'hydrocarbures dans l'Arctique.

«2010 restera légitimement dans les mémoires comme l'année de la marée du golfe du Mexique», mais «2011 sera l'année du rétablissement et de la consolidation (...) et nous donnera l'occasion de remettre les compteurs à zéro et d'ajuster le périmètre de nos activités», a expliqué le patron du groupe, l'Américain Bob Dudley, qui a succédé l'an dernier au Britannique Tony Hayward.

Autre preuve de cette «transformation» de BP, le groupe pétrolier a confirmé, comme attendu, qu'il allait reprendre ses versements de dividendes à ses actionnaires, suspendus depuis la marée noire, mais va réduire de moitié leur montant par rapport à celui d'avant la catastrophe, afin de consacrer une part plus importante de ses bénéfices aux investissements.

Cependant, cette métamorphose pourrait être entravée par les actionnaires russes de TNK-BP, la coentreprise du groupe en Russie. Ces derniers ont contesté l'accord avec Rosneft devant la justice britannique, et BP a admis que cette procédure pourrait retarder son partenariat avec le groupe russe.