Le prix de l'uranium profite d'une nouvelle dose d'énergie. Il a grimpé de 50% depuis juillet et la valeur des actions d'entreprises du secteur a doublé, dans la plupart des cas. Pour plusieurs observateurs, le creux du marché est définitivement derrière nous.

Après avoir atteint les 140$US en 2007, le prix de la livre d'oxyde d'uranium (U308) a vivoté entre les 40 et 45$ pendant la première moitié de 2010. Mais il s'est activé au deuxième semestre pour atteindre 60,50$US hier.

La reprise économique mondiale nécessitera beaucoup d'énergie, note David Bilodeau, cochef de la direction et chef des placements de Majestic Gestion d'actifs, une firme montréalaise spécialisée dans les ressources. Et la demande viendra beaucoup de la Chine.

«Le marché a commencé à prendre la Chine au sérieux, à prendre conscience que leur programme de construction de centrales nucléaires était réel», observe M. Bilodeau.

La Chine compte 13 réacteurs nucléaires en fonction, 23 en construction et 39 autres sont dans les cartons à court et moyen terme, selon un rapport de Dundee Marchés des capitaux.

Dans les derniers mois, la Chine a signé des ententes d'approvisionnement pour 133 millions de livres d'uranium. Encore cette semaine, Cameco a convenu de livrer 29 millions de livres d'uranium sur 15 ans à la «China Guangdong Nuclear Power Holding».

Les spéculateurs, qui avaient contribué à la poussée des prix en 2007, sont également de retour dans le marché, soulignent David Talbot et Julia Carr-Wilson, de Dundee. Mais cette fois, les prix devraient évoluer de façon plus rationnelle.

Dundee prévoit un prix à 75$US en 2013, pour se stabiliser autour de 65$ à long terme. Canaccord Genuity cible les 70$US.

David Bilodeau est plus agressif dans ses prévisions. «Entre 1997 et 2008, le prix du pétrole a augmenté par plus de 15% par année en passant de 18$ à 145$US. On pourrait s'attendre au même type de frénésie sur le marché de l'uranium au cours des 10 prochaines années.»

Selon M. Bilodeau, seule une contraction importante du PIB des pays asiatiques (et la baisse de leur demande énergétique) pourrait annuler cette frénésie.

Du carburant à vie

Plusieurs facteurs pointent vers un soutien durable des prix. Des fabricants de centrales comme la française Areva ou la russe Rosatom promettent à leurs nouveaux clients un approvisionnement à vie en carburant nucléaire. Cela mettra de la pression sur les producteurs.

D'un autre côté, on craint l'épuisement des sources secondaires dès 2013, note l'analyste Eric Zaunscherb, de Canaccord Genuity. Provenant principalement du démantèlement des armes nucléaires, ces sources fournissent actuellement 25% de l'offre d'uranium.

La croissance de la production du Kazakhstan, premier producteur mondial, devrait aussi ralentir. Et la mise en production d'une nouvelle mine d'uranium est généralement très longue, particulièrement au Canada, en Australie, et aux États-Unis. Cela présage que la croissance de l'offre n'égalera pas celle de la demande.