Pour satisfaire la demande mondiale et maintenir la place du Québec parmi les producteurs mondiaux d'aluminium, l'industrie devra doubler sa production de lingots d'aluminium dans les 15 à 20 prochaines années.

C'est tout à fait possible, estime Marc-Urbain Proulx, économiste et professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi. «La production d'aluminium au Québec a été multipliée par trois entre 1980 et 2005, rappelle-t-il. Alors, on peut certainement la doubler en 20 ans.»

La demande est là et elle ira en augmentant, souligne le professeur. «L'industrie consomme de plus en plus d'aluminium parce que les pressions sont fortes pour alléger les trains, les avions, les voitures».

Plus les pays s'enrichissent, et plus ils consomment de l'aluminium, notait pour sa part Jacynthe Côté, à son passage au CORIM. Rio Tinto Alcan prévoit que la demande d'aluminium va doubler au cours des 10 prochaines années et qu'il faudrait construire l'équivalent de la capacité de production actuelle du Saguenay-Lac-Saint-Jean tous les 9 mois pour satisfaire le marché.

Reste la question de l'énergie nécessaire pour augmenter la production. Grâce à sa richesse en électricité renouvelable, le Québec est en bonne position pour augmenter ses attentes envers l'industrie de l'aluminium, croit le professeur Proulx.

«Les lots d'énergies disponibles et fiables se font de plus en plus rares dans le monde», souligne-t-il. Les pays qui en ont encore ne peuvent pas offrir la sécurité et la stabilité des approvisionnements que recherche l'industrie avant d'investir des milliards de dollars.

Marc-Urbain Proulx rappelle qu'après avoir investi des centaines de millions de dollars dans des études préliminaires, Rio Tinto Alcan a abandonné un projet d'aluminerie à Coega, en Afrique du Sud, faute de pouvoir compter sur un approvisionnement fiable en énergie.

Le Québec a l'énergie nécessaire pour alimenter l'expansion de l'industrie, selon lui. Hydro-Québec pourra compter sur 1500 mégawatts supplémentaires provenant de ses projets actuellement en construction, plus les 3500 mégawatts prévus par le Plan Nord du gouvernement Charest, soit 5000 mégawatts de plus.

Le potentiel qui reste à développer est encore plus élevé, soutient Marc-Urbain Proulx. Mais quoi qu'il en soit, ces 5000 mégawatts suffiraient puisqu'il faudrait entre 3000 et 4000 mégawatts pour alimenter l'expansion souhaitée par les alumineries québécoises.

Le Québec peut valoriser davantage cette énergie, selon lui, pas en augmentant le prix, mais en exigeant plus de retombées.

À la fin des contrats à rabais conclus avec les alumineries, entre 2014 et 2016, l'industrie paiera le tarif normal de la grande industrie (le tarif L), qui sera augmenté annuellement en même temps que tous les autres tarifs d'Hydro-Québec.

Le professeur estime que le Québec ne peut pas se permettre d'augmenter davantage le tarif consenti aux alumineries, mais il doit exiger plus de transformation sur place. «Pour chaque tonne de production supplémentaire, il faut exiger la transformation d'une tonne de plus», dit-il.

La transformation, ce n'est pas seulement la fabrication de pièces d'automobiles ou d'ailes d'avions. C'est aussi du fil, de la tôle et des produits extrudés, dont la production pourrait facilement être augmentée.

C'est plutôt le contraire qui se produit, constate le professeur. Au Saguenay, les alumineries produisent de plus en plus des gueuses, soit de l'aluminium encore plus brut que les lingots. «Avant, on faisait beaucoup d'alliages, mais depuis que Rio Tinto a acheté Alcan, on en fait moins», explique-t-il.

Actuellement, le quart de la production d'aluminium du Québec est transformé ici. Lors de ses dernières négociations avec les alumineries, le gouvernement Charest a abandonné l'idée de forcer les entreprises à faire plus de transformation.

Le dernier à le faire a été le gouvernement de Bernard Landry, en 2002. Il a mis 500 mégawatts aux enchères parmi les alumineries, et il a choisi le projet d'expansion d'Alcan à Sept-Îles, qui s'est engagée à créer en retour 1100 emplois dans la transformation.

Alcan, maintenant Rio Tinto Alcan, a jusqu'en 2012 pour livrer ces emplois ou payer une pénalité de 100 000$ par emploi inexistant.

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Vert Aluminium

Émissions de CO2 par tonne

Asie 14 tonnes

Australie 14 tonnes

Afrique 13 tonnes

États-Unis 11 tonnes

Europe 6 tonnes

Amérique du sud 6 tonnes

Canada* 2,5 tonnes

*90% de l'aluminium canadien est produit au Québec

Source : Association de l'Aluminium du Canada