Stephen Harper se dit ouvert à conclure une entente avec Québec au sujet du convoité gisement Old Harry, situé à cheval sur la frontière entre le Québec et Terre-Neuve-et-Labrador, dans le golfe du Saint-Laurent.

«Le gouvernement du Canada est très intéressé à discuter avec Québec pour obtenir une entente comme celle de (Terre-Neuve-et-Labrador)», a indiqué le premier ministre Harper hier au cours d'un passage à St John's. Il s'agit d'une première déclaration d'ouverture depuis longtemps dans ce dossier par un premier ministre canadien.

La ministre des Ressources naturelles, Nathalie Normandeau, est enthousiasmée. «Les planètes n'ont jamais été aussi bien alignées», assure-t-elle.

Elle explique que les négociations sont aussi facilitées par le fait que son homologue au fédéral, Christian Paradis, soit un Québécois. Les discussions ont avancé et les sous-ministres de Québec et Ottawa se parlent maintenant directement, ajoute-t-elle. Une proposition officielle d'entente devrait être envoyée cet automne.

Les fonds marins sont de compétence fédérale. En 1985, Ottawa a toutefois conclu une tente administrative avec Terre-Neuve qui lui permet d'exploiter les ressources pétrolières et gazières.

Cette entente a mené à la création de l'Office Canada/Terre-Neuve. Québec attend encore d'en signer une. Ce n'est pas son seul problème. Selon un tracé établi en 1964, les deux tiers du gisement Old Harry reposent en territoire québécois. Mais Terre-Neuve refuse de reconnaître cette frontière. Elle veut une plus grande part du gisement, qui recèlerait 2 milliards de barils de pétrole.

Mercredi, l'Assemblée nationale a adopté une motion à l'unanimité pour demander à l'Office Canada/Terre-Neuve de ne plus accorder un seul permis de levé sismique ou de forage dans Old Harry avant 2012, l'année de la fin du moratoire québécois dans le Saint-Laurent. C'est en 2012 que Québec obtiendra ses évaluations environnementales stratégiques pour le golfe du Saint-Laurent. Le gouvernement décidera s'il veut renouveler le moratoire.

La pression économique pourrait être grande. Les retombées du gisement pour le Québec avaient déjà été évaluées à 7 milliards de dollars, indique Mme Normandeau. «Avec une telle réserve, on pourrait peut-être devenir la Norvège de l'Amérique du Nord», avance-t-elle.

Pour ne pas nuire aux négociations, la ministre Normandeau refuse de détailler les demandes de Québec.

Critique de Pauline Marois

Pauline Marois critique «l'inaction» du gouvernement Charest dans le dossier. Elle prétend que le PQ était «sur le point» de conclure une entente avant de perdre le pouvoir en 2003.

Que demanderait la chef du PQ? «On est prêts à partager les redevances (avec Ottawa) jusqu'à ce que nous soyons souverains», indique-t-elle.

Mme Marois ne se prononce pas en faveur de la nationalisation. Elle souhaiterait toutefois que l'exploitation rapporte au gouvernement «jusqu'à 60% des bénéfices». «Il y a des droits, des permis, des redevances, des impôts, la fiscalité, même des prises de participation dans certaines entreprises», a-t-elle donné en exemple. «Ces ressources appartiennent aux Québécois et que c'est eux qui doivent en avoir le bénéfice.»

Le péquiste Bernard Drainville, critique de l'opposition officielle aux affaires intergouvernementales, croit qu'Ottawa pourrait refuser de signer une entente afin de ne pas donner un argument en faveur de la souveraineté.