Junex (V.JNX), la petite société d'exploration qui ambitionne de devenir le premier producteur québécois de gaz naturel, a un défi de taille devant elle: il lui faut trouver les capitaux nécessaires sans abandonner le contrôle de sa destinée à des géants de l'industrie.

Ce ne sera pas facile, convient Jean-Yves Lavoie, président et fondateur de Junex, en entrevue avec La Presse.

Partie de rien il y a 10 ans, la société qu'il a fondée est assise aujourd'hui sur un potentiel estimé à plusieurs milliards de dollars. Elle détient la moitié des permis d'exploration délivrés par le gouvernement du Québec pour le gaz de schiste.

C'est de peine et de misère que Jean-Yves Lavoie, vétéran géologue, a pu réunir le financement nécessaire pour explorer le potentiel québécois. «Les premières années, on faisait rire de nous», rappelle-t-il.

À mesure que ce potentiel se précise, obtenir du financement devient plus facile, dit-il, mais il devient de plus en plus difficile pour Junex d'éviter la dilution de son capital-actions.

La règle du jeu

C'est la règle du jeu dans l'industrie des ressources: les juniors les plus prometteuses se font avaler par des plus grosses entreprises qui ont les moyens et l'expertise nécessaires pour exploiter la ressource.

Les exemples sont nombreux. Malgré la faiblesse des prix du gaz sur le marché, Shell a payé plus tôt cette année 4,7 milliards pour un accès au gaz de schiste de Marcellus dans l'État de New York développé par une plus petite entreprise, East Resources.

Jean-Yves Lavoie, lui, veut que Junex franchisse le pas entre l'exploration et la production tout en continuant d'être contrôlée par intérêts québécois.

Selon lui, la nationalisation de l'industrie du gaz de schiste n'est pas une solution réaliste. C'est une industrie qui nécessite de l'argent, beaucoup d'argent, et de l'expertise, deux ressources qu'un gouvernement n'a pas en abondance. «Ça coûterait beaucoup trop cher», estime-t-il. Junex est à cinq ans d'une mise en production des gisements les plus prometteurs, selon son fondateur. Il n'est pas sûr de réussir à garder les mains sur le volant. «J'ai cogné à toutes les portes», dit-il, pas trop content des résultats de ses démarches.

Depuis sa création en 2001, l'entreprise a investi 50 millions pour trouver du gaz. C'est beaucoup d'argent pour une junior, mais bien peu dans cette industrie dévoreuse de capitaux.

Actuellement, les dirigeants de Junex et des «amis» de la première heure comme les frères Lemaire détiennent le tiers des actions de l'entreprise. La plus grande part est la propriété d'investisseurs institutionnels, dont la Caisse de dépôt, qui détient 2,5 millions des 60 millions d'actions en circulation de Junex. Le reste, soit 20% est détenu par le public.

En 2008, Junex a réalisé un financement de 22,5 millions, ce qui donnait une valeur de 6,20$ à son titre qui s'échange actuellement à une fraction de cette valeur. L'action valait hier 1,77$ et, depuis un an, sa valeur a varié entre 1,36$ et 2,70$.

Compte tenu de la faiblesse du prix de son action, il n'est pas question de retourner bientôt sur le marché des capitaux.

Cependant, à la prochaine ronde de financement, les dirigeants de Junex devront encore faire un choix difficile entre diluer le capital-actions ou céder une partie de ses permis.