La Russie, troisième exportateur mondial de blé, a annoncé jeudi qu'elle appliquait un embargo aux exportations de céréales en raison de la canicule qui provoque l'effondrement de ses récoltes et menace d'entrainer pénurie et hausse des prix sur les marchés intérieurs.

L'annonce de cette mesure d'exception par le Premier ministre Vladimir Poutine, a ravivé encore la flambée des cours du blé sur les marchés mondiaux.

Les cours du blé ont atteint cette semaine des sommets sur les marchés mondiaux, dépassant les 200 euros par tonne en Europe, en raison des inquiétudes sur les exportations russes.

«En raison des températures anormalement hautes et de la sécheresse, j'estime justifié d'instaurer un embargo temporaire sur les exportations de blé et de produits agroalimentaires dérivés», a déclaré jeudi M. Poutine, selon des images retransmises par la télévision russe.

La Russie est en proie à une canicule et à une sécheresse sans précédent depuis début juillet, et à de gigantesques incendies de forêt.

L'embargo sur les exportations sera appliqué du «15 août au 31 décembre», a précisé le porte-parole de M. Poutine, Dmitri Peskov.

Moscou a par ailleurs proposé au Kazakhstan -un autre grand producteur de céréales- et au Bélarus d'introduire aussi un moratoire sur leurs exportations, dans le cadre de l'Union douanière entre ces trois pays d'ex-URSS.

La Russie, qui fournit environ 8% de la production de blé de la planète, avait annoncé en début de semaine une révision à la baisse de ses récoltes de blé à 70-75 millions de tonnes cette année, contre quelque 90 millions de tonnes habituellement.

En 2009, le pays a exporté 21,4 millions de tonnes de céréales.

«Il faut empêcher l'inflation des prix intérieurs et également sauver le cheptel russe» qui risquerait d'être abattu en cas de manque de nourriture en raison de prix intérieurs trop élevés sur les céréales, a expliqué M. Poutine lors d'un conseil des ministres.

La consommation intérieure de céréales en Russie est d'environ 77 millions de tonnes en moyenne, et les réserves du pays s'élèvent à moins de 10 millions de tonnes.

Le Premier ministre a en outre annoncé une aide financière de 35 milliards de roubles (900 millions d'euros) aux producteurs de céréales touchés par la sécheresse.

Dix des 35 milliards seront une «dotation sans contrepartie» et les 25 milliards restants seront accordés sous forme de «crédits à taux avantageux», a-t-il dit.

En raison de la sévérité de la sécheresse, l'état d'urgence a été décrété dans 27 régions agricoles de Russie.

Les prix du blé, qui s'étaient déjà envolés de près de 40% en juillet, ont bondi au début de la semaine à leur plus haut niveau en presque deux ans sur les marchés financiers. Ces prix dépassent les 200 euros la tonne sur le marché européen.

En fin de semaine dernière, le Conseil international des matières premières agricoles (IGC), basé à Londres, avait estimé que la production de blé de la Russie pourrait se limiter de 50 millions de tonnes en 2010. Des inquiétudes portent aussi sur les productions du Kazakhstan et de l'Ukraine, également touchés par la sécheresse.

Le vice-ministre de l'Agriculture russe, Alexandre Belaïev, avait tenté mardi de calmer les marchés en affirmant que «pour le moment» Moscou n'envisageait pas de limiter ses exportations.

La Russie avait exprimé l'ambition de doubler ses exportations à 40-50 millions de tonnes par an, en modernisant son agriculture et en augmentant ses livraisons à des pays comme l'Egypte.