Le «phosphate de fer lithié» ne vous dit rien? Il faudra vous mettre à la page. Parce que la plus grosse usine du monde capable d'en fabriquer débarquera bientôt à Candiac, sur la Rive-Sud.





L'entreprise allemande Süd-Chemie investira en effet 60 millions d'euros (environ 78 millions CAN) dans une nouvelle usine capable de produire 2500 tonnes de phosphate de fer lithié par année dès 2012. Selon la direction, le projet créera plus de 50 emplois.



Süd-Chemie exploite déjà une usine similaire mais beaucoup plus petite à Saint-Bruno par l'entremise de sa filière québécoise, Phostech Lithium.

«Cet investissement est d'une importance stratégique centrale pour Süd-Chemie», a expliqué hier Günter von Au, président du conseil de l'entreprise.

Le phosphate de fer lithié est l'un des principaux ingrédients actifs des batteries au lithium des voitures électriques, un marché que Süd-Chemie juge en pleine expansion.

À elle seule, la production annuelle de la future usine de Candiac permettra de fabriquer 50 000 batteries de voitures électriques ou 50 0000 batteries de voitures hybrides.

Pourquoi Candiac? Selon la direction de Süd-Chemie, cela n'a rien à voir avec les futures mines de lithium qui pourraient voir le jour au Québec d'ici quelques années, ni avec la proximité du marché américain.

«Nous avons déjà une usine de production et une expertise au Québec. Pour nous, la façon la plus logique et la plus rapide d'entrer en exploitation était donc de miser sur cet emplacement», a expliqué à La Presse Affaires le porte-parole de Süd-Chemie en Allemagne, Jochen Orlowski.

La présence de Süd-Chemie au Québec est l'aboutissement d'une longue histoire qui a commencé dans un labo universitaire du Texas, où a été découvert le principe de la cathode à base de phosphate de métal lithié.

Le brevet a ensuite été acquis par Hydro-Québec, puis les travaux se sont poursuivis à l'Université de Montréal. C'est de là qu'est née Phostech Lithium en 2001. L'allemande Süd-Chemie a collaboré avec Phostech Lithium dès 2003, avant d'y investir directement en 2005 et d'acquérir l'entreprise en 2008.

La nouvelle usine pourrait représenter un débouché pour les quelques minières québécoises qui travaillent à chercher du lithium dans le sous-sol québécois. Le projet le plus avancé, celui de Québec Lithium de l'entreprise Canada Lithium, devrait entrer en production en 2012, donc au même moment que l'ouverture de l'usine de Candiac.

Süd-Chemie refuse de dévoiler où elle s'approvisionne en lithium pour des raisons concurrentielles, mais il est probable qu'une bonne partie de sa matière première provienne de l'Amérique du Sud.

«C'est certain qu'on va travailler le plus possible avec de potentiels fournisseurs locaux. On a des objectifs de qualité à respecter. Après, c'est le prix. C'est certain que si on achète des matières premières localement, on va économiser sur le transport, mais il est trop tôt pour commenter davantage à ce point-ci», dit Denis Geoffroy, directeur technique et chef de la direction par intérim de Phostech Lithium.

Selon des observateurs, plusieurs défis attendent toutefois les éventuels producteurs de lithium québécois. Le lithium sud-américain provient de saumures et se récolte à faible prix. Les minières québécoises devraient aussi se doter d'une usine capable de transformer leur minerai en carbonate de lithium, qui serait ensuite revendu à Phostech Lithium.

Phostech Lithium emploie actuellement une quarantaine personnes dans son centre de recherche et développement (R&D et son usine, qui a une capacité de 400 tonnes par année. Süd-Chemie, quant à elle, est une multinationale établie à Munich qui emploie 6500 personnes dans le domaine des produits chimiques spécialisés et qui a généré des ventes de 1,1 milliard d'euros l'an dernier (environ 1,43 milliard CAN).