L'incapacité de BP de mettre fin à l'écoulement de millions de gallons de brut dans le golfe du Mexique pourrait menacer l'indépendance du plus important producteur de pétrole et de gaz aux États-Unis.

Les actions de BP ont chuté de 36% depuis que la plateforme de forage Deepwater Horizon louée par l'entreprise a explosé le 20 avril, ce qui a fait perdre plus de 40 milliards de livres (58 milliards US) en valeur à l'entreprise. Cela pourrait susciter de l'intérêt pour une acquisition, selon des investisseurs.

«La valeur de BP sur le marché s'est érodée substantiellement, alors l'entreprise pourrait devenir une cible pour une acquisition», a dit Dirk Hoozemans, du Robeco Group. La vigueur avec laquelle le PDG de BP Tony Hayward fera face à ce désastre et à ses conséquences sera déterminante, selon lui.

Les coûts pour BP pourraient atteindre 37 milliards, l'équivalent de trois ans de flux de trésorerie, selon Kim Fustier, analyste au Crédit Suisse. L'entreprise fait également l'objet d'une enquête criminelle et civile aux États-Unis. «Il y a de 10 à 20% de chances que BP soit achetée», selon Gudmund Halle Isfeldt, analyste chez DnB NOR ASA. «Le seul candidat réel, par sa taille et ses activités, comparables à celles de BP, serait Royal Dutch Shell.»

Une alliance BP-Shell a été discutée par les deux entreprises plus d'une fois. Les PDG de BP et Shell ont envisagé une fusion en 2004, selon les mémoires de John Browne, ancien PDG de BP. Les porte-parole de BP et de Royal Dutch Shell ont refusé de commenter l'information.

Chute de l'action

L'action de BP a gagné 3,1% hier à la Bourse de New York, mettant fin à une glissade de trois jours à Londres. M.Hayward devrait promettre malgré tout de maintenir le dividende à 56 cents US l'action cette semaine, selon le Times de Londres. Cela représenterait 9,7% du prix de l'action, le ratio le plus élevé parmi 18 entreprises semblables, selon les chiffres de Bloomberg.

En plus d'être le plus important producteur de pétrole et de gaz aux États-Unis, BP est le plus grand exploitant du golfe du Mexique, où il pompe plus de 450 000 barils de brut par jour. L'an dernier, l'entreprise a pompé 3,95 millions de barils de pétrole et de gaz par jour, ce qui en fait le plus important producteur au monde, à l'exception des entreprises gouvernementales.

BP a dépensé 990 millions US pour tenter de colmater la fuite et pour nettoyer le pétrole écoulé dans le golfe. Les réclamations des propriétaires terriens, des hôteliers et des pêcheurs feront grimper la facture. La valeur de BP sur le marché, qui surpassait celle de Shell au début de l'année, est passée derrière celles de Petroleos Brasileiro SA, Chevron Corp. et OAO Gazprom en Russie.

Pas d'acheteurs

«Nous arrivons dans une zone où le prix de l'action incite les analystes à spéculer sur les possibilités d'acquisitions, parce que la perte de valeur sur le marché est beaucoup plus importante que les coûts estimés de la pire éventualité», a dit Ivor Pether, de Royal London Asset Management. «Mais il n'y a pas d'acheteurs en ce moment, parce que l'incertitude à court terme est tellement élevée.»

M.Hayward a réduit le ratio de la dette nette de BP à 19%, comparativement à 23% l'an dernier, ce qui lui confère une meilleure capacité de faire face aux coûts de nettoyage et aux autres responsabilités. L'entreprise possède une cote de crédit AA chez Standard & Poor's et a fait un profit record de 6 milliards US au premier trimestre sur un revenu de 73 milliards US.

«Les responsabilités de BP pourraient atteindre des dizaines de milliards de dollars, mais je crois qu'ils ont la capacité de faire face à un tel coup dur», a dit Jason Gammel, analyste chez Macquarie Securities USA. «Il est trop tôt pour dire que BP est candidate à une acquisition, parce que personne ne veut devoir rembourser une dette impossible à quantifier.»

 

BP: Un géant international

> Revenus (2009): 239 milliards US

> Profits (2009): 14 milliards US

> Perte de la valeur boursière de BP depuis la début de la marée noire: -58 milliards US ou -34%

> Nombre d'employés: 80 300 (au 31-12-09)

> Réserves pétrolières: 18,3 milliards de barils

> Stations-service dans le monde: 22 400

> Présence mondiale: 30 pays

> Raffineries: 16

> Production des raffineries: 2,3 million de barils par jour (2009)