Même si Québec a sorti la hache pour sabrer les primes dans la haute fonction publique, le grand patron d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, encaissera ce printemps un bonus supérieur à celui de l'an dernier.

Pour les plus hauts dirigeants de la société d'État, d'ailleurs, les primes continueront allègrement, en dépit de la directive gouvernementale qui met un terme aux primes pour l'ensemble des gestionnaires de la fonction publique.

Selon le ministre des Finances, Raymond Bachand, refuser ces primes pour les dirigeants d'Hydro équivaut à «passer une loi spéciale, rouvrir la convention collective et abolir les bonus de tous les gens qui sont couverts par cette convention».

Hydro-Québec, comme d'autres sociétés d'État, est régie par la Loi sur la gouvernance, et son conseil d'administration est indépendant. On attend des dirigeants de ces «sociétés commerciales» des «efforts équivalents rigoureux» pour compenser ces primes.

Hier à l'Assemblée nationale, le député péquiste de Jonquière, Sylvain Gaudreault, s'est interrogé sur la pertinence des primes accordées à M. Vandal. Il a obtenu pour 2009 un bonus de 125 000$ qui s'ajoute à son salaire de 421 000$. Par rapport à l'année précédente, ce sont des augmentations respectives de 3000$ et 4000$. Pourtant, a relevé M. Gaudreault, la feuille de route du patron d'Hydro-Québec depuis 12 mois est plutôt ternie par des erreurs de jugement. La société d'État a laissé échapper l'achat d'Énergie Nouveau-Brunswick, n'a pu gérer le problème de l'entretien de Gentilly 2 et a même commandité des écoles privées cossues auxquelles est lié M. Vandal.

«Laxisme»

Pourtant, au printemps 2009, embarrassé, le ministre Claude Béchard, alors responsable d'Hydro-Québec, avait justifié les bonus du président Vandal en expliquant qu'on les lui avait accordés pour sa performance «avant la crise financière» et que ces primes seraient revues par la suite, a rappelé M. Gaudreault. «C'est évident que le gouvernement n'a aucun contrôle, aucune autorité sur ces sociétés, même quand un ministre dit que ce sera revu, il n'y a rien qui change», a insisté le député péquiste.

Selon lui, ce laxisme est difficilement justifiable - les abonnés ont encaissé 20% d'augmentation de tarifs depuis 2004, et 2% de hausse l'an dernier seulement.

M. Bachand estime que la révision de ces primes serait un geste aussi odieux que la décision du gouvernement péquiste, au début des années 80, de rouvrir les conventions collectives et de « (réduire) le salaire des enseignants de 20%». M. Bachand était, il faut le dire, aux premières loges à l'époque comme chef de cabinet de Pierre Marc Johnson, gros canon du cabinet de René Lévesque.

En faisant le tour de la liste des gestionnaires d'Hydro-Québec, on remarque aussi que tous ont reçu en 2009 des primes presque aussi généreuses que celles de l'année précédente. André Boulanger, président de la filiale distribution, a reçu 102 000$ en bonus, comparativement à 106 000$ l'année précédente. À son salaire de 369 000$, on doit aussi ajouter 17 000$ pour l'utilisation de son auto - prime à laquelle M. Vandal n'a pas droit, car Hydro-Québec lui fournit la limousine et le chauffeur.

Isabelle Courville a eu droit à une prime de 89 500$, 4000$ de plus que l'année précédente, qui s'est ajoutée à son salaire de 354 000$. Richard Cacchione, président d'Hydro Production, a un salaire de 367 000$, mais doit se contenter de 100 000$ de bonus, 2000$ de moins que l'année précédente.