Comme la route 167, qui monte du lac Saint-Jean et qui sera prolongée jusqu'au coeur des Monts Otish, quelque 500 km plus au nord, la route est longue pour le projet Matoush, qui pourrait mener à la première mine d'uranium du Québec.

La société Ressources Strateco est à la tête du projet Matoush depuis 2005. Mais elle ne produira les premières livres d'uranium québécois qu'au tournant de 2014, au plus tôt, si le projet se concrétise. «L'uranium, c'est un autre monde, dit le président Guy Hébert, qui a déjà dirigé des mines d'or et de métaux de base par le passé. Je ne m'attendais pas à ça en commençant.»

En 2006, Strateco a prouvé l'existence d'un gisement sur la propriété située à environ 275 km au nord de Chibougamau, sur le territoire cri de Mistissini. Depuis, la société y a investi 60 millions et a présenté à la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) un premier projet de mine d'uranium en 20 ans. «C'est un projet robuste, bâti dans un des cadres réglementaires les plus sévères au monde», note Guy Hébert.

Les exigences sont complexes et coûteuses. Strateco a dépensé 4,5 millions en études environnementales et 5 millions en études de licence pour la CCSN. «Il faut faire une étude d'impact comme si quelqu'un vivait pendant 24 heures par jour pendant 59 ans près de la partie la plus riche du gisement, explique M. Hébert. À partir de là, il faut savoir quoi faire pour éliminer le risque. Les mesures sont extrêmes.»

Strateco s'emploie maintenant à obtenir la licence pour creuser le sol et effectuer plusieurs vérifications sur l'eau, les radiations, les émissions de radon. Strateco veut extraire 750 tonnes de minerai, qu'elle entreposera sous terre. Guy Hébert prévoit obtenir la licence cet été ou cet automne, mais cela sera précédé de trois séries d'audiences publiques sur les aspects environnemental et technique. Les premières auront lieu à la fin mai, à Chibougamau et Mistissini.

Une fois la licence obtenue, Strateco procédera aux travaux en 2011 et 2012, pour un coût de 50 millions. Par la suite, il y aura de nouvelles études d'impact, et un autre processus d'audiences publiques.

1,5 milliard

Selon la plus récente étude d'opportunité, les ressources indiquées et inférées atteignent plus de 20 millions de livres d'uranium, soit 1,5 million de tonnes à des teneurs variant de 0,34 à 0,89%.

«Le gisement vaut environ 1,5 milliard à date, note Guy Hébert. Ce qui nous laisse voir des profits d'opération d'un milliard sur sept ans.»

«Le projet est sur des assises solides et avance de façon positive, souligne Éric Lemieux, analyste minier chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne. Il doit traverser certaines étapes encore, mais il a tous les ingrédients pour devenir la première mine au Québec»

Chibougamau s'informe

Après l'opposition suscitée par la présence de Terra Ventures à Sept-Îles, l'industrie uranifère compte beaucoup sur Guy Hébert et Strateco pour redorer le blason du secteur. «Dès 2007, on a fait ce qui n'a pas été fait à Sept-Îles, soutient le président. On a travaillé sur les communications avec les communautés.»

La mairesse de Chibougamau, Manon Cyr, souligne que l'entreprise a répondu jusqu'à maintenant à toutes les questions de la communauté. «L'entreprise est très accessible. On peut leur dire chapeau!»

Mme Cyr soutient que les citoyens sont en mode information pour comprendre le fonctionnement et les impacts d'une mine d'uranium. «Des gens du nord de la Saskatchewan sont venus nous visiter pour nous raconter leur vécu à proximité des mines d'uranium», précise la mairesse.

Le chef de la nation crie de Mistissini n'a pas rappelé La Presse.