La québécoise Innergex (T.INE) veut surfer sur la vague des énergies vertes qui déferle sur l'Ontario et la Colombie-Britannique. Et elle le fera... sous un seul chapeau.

Le spécialiste des énergies renouvelables a annoncé hier qu'il mettait fin à la bête à deux têtes qu'il formait. Innergex comptait à la fois un fonds de revenu et une société cotée en Bourse; or, si tout se passe comme prévu, le fonds de revenu disparaîtra et rejoindra la corporation.

Les actionnaires de la corporation (Innergex énergie renouvelable, ou IER) ont célébré ce mariage en faisant grimper leur action de 25,2%, à 6,80$.

Ceux du fonds de revenu Innergex appelé à disparaître ont été nettement moins enthousiastes. Ils ont fait chuter l'action du fonds de 27 cents, ou 2,58%, à 10,21$.

«La transaction vient mettre fin à l'incertitude qui entourait la conversion de la fiducie et permet de regrouper nos équipes», a commenté hier à La Presse Affaires le président et chef de la direction d'Inergex, Michel Letellier.

En réunissant ses deux morceaux, Innergex devient «l'un des plus importants producteurs indépendants canadiens produisant uniquement de l'énergie renouvelable», a fait valoir l'entreprise.

Historiquement, la société s'occupait de mettre au point de nouveaux projets d'énergie hydroélectrique et éolienne. Lorsque ceux-ci produisaient de l'électricité, donc des revenus récurrents, ils étaient envoyés du côté du fonds de revenu.

Ensemble, les deux morceaux donneront maintenant naissance à un producteur d'électricité qui génère 326 mégawatts d'électricité. D'ici deux ans, 128 mégawatts de plus s'ajouteront au portefeuille.

L'entreprise veut aussi profiter de l'engouement pour les énergies renouvelables qui déferle en Ontario et en Colombie-Britannique, les deux marchés actuellement les plus dynamiques au pays. Innergex a soumissionné sur des contrats de minicentrales hydroélectriques qui totalisent 195 mégawatts en Colombie-Britannique. Elle espère aussi développer près de 400 mégawatts d'énergie éolienne pour l'Ontario, qui a ouvert les valves récemment pour attirer les investissements en énergies vertes.

Une transaction nécessaire

Ce n'est pas de gaieté de coeur qu'Innergex a mis la hache dans son fonds de revenu.

Le 31 octobre 2006, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, avait déclaré qu'il mettra fin aux avantages fiscaux dont bénéficient les fiducies de revenu en 2011 lors d'une annonce surnommée «le massacre de l'Halloween».

Innergex a trouvé la solution. Le fonds de revenu profite du fait que l'action de sa petite soeur, Innergex énergie renouvelable, a chuté pendant la crise financière pour l'acheter à bon prix. Puis, par le mécanisme d'une prise de contrôle inversée, tout ce beau monde fonctionnera ensemble sous la coquille de la petite soeur.

Techniquement, chaque actionnaire du fonds de revenu recevra 1,46 action d'Innergex énergie renouvelable (IER). Puisqu'un fonds de revenu distribue ses profits aux actionnaires, ceux-ci étaient habitués à recevoir des sommes importantes. Question de ne pas les échauder, Innnergex a annoncé la création d'un dividende de 58 cents par action d'IER.

Avec 1,46 action d'IER, un actionnaire du fonds se retrouve donc avec un dividende de 85 cents, soit l'équivalent de la distribution qu'il recevait auparavant.

L'actionnaire d'IER, lui, a de quoi célébrer. Non seulement il se voit acheter ses actions à 7$ l'unité, soit une prime de 29%, mais il bénéficiera aussi du dividende.

Le hic, c'est qu'Innergex versera maintenant 100% de ses flux de trésorerie sous forme de dividendes. Un problème? Non, répond Pierre Lacroix, analyste chez Valeurs mobilières Desjardins, qui explique qu'Innergex n'aura pas besoin d'investir avant 2013 pour construire les centrales sur lesquelles elle vient de soumissionner. «L'entreprise peut aussi se financer avec de la dette ou en levant d'autre équité», dit l'analyste, qui estime la transaction positive pour les actionnaires d'IER.

La transaction devra être approuvée par les actionnaires des deux partis avant d'être réalisée. Il existe aussi la possibilité qu'un tiers parti débarque avec une contre-offre supérieure, une éventualité jugée probable par un analyste qui a préféré garder l'anonymat.