Sans surprise, le rapport du comité mandaté par le gouvernement du Nouveau-Brunswick pour évaluer la vente d'Énergie NB à Hydro-Québec s'est prononcé hier en faveur de la transaction, ce qui a fait grimper un peu plus la colère des opposants.

«C'est un cas évident de fraude», est l'un des commentaires vitrioliques qu'on pouvait lire parmi les dizaines d'autres réactions négatives sur le site de la CBC après la publication du rapport du comité présidé par le magnat du chocolat David Ganong.

Les opposants à la transaction reprochent aux membres du comité de ne pas être indépendants et surtout d'avoir limité leurs consultations à ceux qui étaient en faveur de la vente d'Énergie NB.

En fait, le comité a consulté un opposant, le professeur à l'Université de Moncton Yves Gagnon, qui s'est déjà prononcé publiquement contre la vente d'Énergie NB à Hydro-Québec.

«Ils m'ont rencontré une journée avant de mettre fin à leurs travaux, a-t-il raconté hier au cours d'un entretien avec La Presse Affaires. J'ai l'impression que leur rapport était déjà écrit avant de me rencontrer.»

Selon lui, un seul des six membres du comité peut être considéré comme indépendant, et c'est John McLaughlin, l'ancien président de l'Université du Nouveau-Brunswick. Les autres sont soit liés au gouvernement, soit liés à la grande entreprise qui bénéficierait d'une baisse importante des tarifs d'électricité si la transaction se réalise, a-t-il expliqué.

Outre MM. Ganong et McLaughlin, le comité consultatif était formé d'Allison McCain, présidente de McCain Foods, Louis Lapierre, ancien président de la chaire KC Irving en développement durable de l'Université de Moncton, de Gilles Lepage, coprésident du comité du gouvernement sur l'autosuffisance énergétique, et d'Elisabeth Weir, chef de la direction de l'organisme gouvernemental Efficiency New Brunswick.

Dans son rapport, le comité se dit d'avis que la transaction sera positive pour le Nouveau-Brunwick, parce qu'elle fera diminuer les tarifs d'électricité à moyen et à long terme, qu'elle réduira la dépendance de la province aux combustibles fossiles et qu'elle diminuera la dette du gouvernement.

Les avantages de la transaction apportent «une valeur réelle et positive au Nouveau-Brunswick par rapport à la situation actuelle», affirme David Ganong.

Loin de mettre fin à la controverse, le rapport du comité mandaté par le gouvernement de Shawn Graham risque au contraire de continuer à l'alimenter. Une coalition formée de syndicats et de partis d'opposition s'est adressée aux tribunaux pour stopper la transaction. Selon ses arguments, Énergie NB n'est pas la propriété du gouvernement mais celle de tous les Néo-Brunswickois, qui doivent donc être consultés sur son avenir.

Le gouvernement de Shawn Graham voudrait conclure le transaction le 31 mars prochain. Devant la levée de boucliers que le projet de transaction a soulevée dans la population, une deuxième version a été négociée avec Hydro-Québec. La transaction amendée prévoit qu'Hydro achète pour 3,2 milliards de dollars les centrales hydroélectriques et la centrale nucléaire d'Énergie NB, mais laisse le réseau de transport et le réseau de distribution à la province.

Un chercheur indépendant, Gordon Weil, mandaté par l'Institut des études de marché de l'Atlantique, a conclu que la deuxième version de la transaction était aussi avantageuse pour Hydro-Québec que la première, puisqu'elle lui laisserait l'utilisation illimitée des lignes de transmission, même sans en être propriétaire.

De son côté, le premier ministre, Shawn Graham, n'en finit plus de tenter de sauver la transaction. La semaine dernière, il a dû s'excuser publiquement d'avoir affirmé que le conseil d'administration d'Énergie NB avait voté à l'unanimité en faveur de la transaction. En fait, son président et chef de la direction, David Hay, s'était abstenu de voter avant de remettre sa démission.