Les pays émergents ont supplanté les pays développés par leur consommation d'énergie pour la première fois en 2008, a souligné mardi le pétrolier BP, mais ils gaspillent davantage d'énergie et sont les premiers contributeurs à l'essor du charbon, préoccupant pour l'environnement.

Première historique: en 2008, la consommation d'énergie des pays émergents a surpassé celle des pays de l'Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE).

Elle a représenté 51,2% de la consommation mondiale, a précisé l'économiste de BP, Christoph Rühl, qui commentait mercredi le rapport annuel sur l'énergie de BP, une étude sur le secteur menée depuis 48 ans par le géant pétrolier britannique.

«Le centre de gravité des marchés mondiaux de l'énergie s'est nettement, et de manière irréversible, déplacé vers les pays émergents», a abondé Tony Hayward, le patron de BP.

Et leur poids ne pourra que se renforcer au fil des années, sachant qu'ils assurent la quasi totalité de la croissance de la demande d'énergie: l'an dernier, la Chine seule a compté pour les trois quarts de la hausse de la demande d'énergie (+ 1,4%, la plus faible depuis 2001 en raison de la crise), le reste venant de la région Asie-Pacifique en général, qui a représenté 87% de ces 1,4%.

Mais la domination des pays émergents sur la scène énergétique est lourde de menaces pour l'environnement: elle s'accompagne d'un essor du charbon, l'énergie abondante et bon marché sur laquelle l'Inde et la Chine ont misé pour se développer.

Alors que la consommation de pétrole a reculé pour la première fois en 16 ans, la demande de charbon est ainsi restée dynamique et a progressé de 3,1%, selon les estimations de BP. Un chiffre qui masque des contrastes énormes entre économies émergentes et développées: l'utilisation du charbon a reculé dans les premières, notamment en Allemagne et au Royaume-Uni, explosé dans les secondes.

«Sans la contribution de l'Inde et de la Chine, la consommation (mondiale de charbon) aurait chuté, a ainsi estimé Christoph Rühl.

Autre menace pour l'environnement: les pays émergents consomment encore sans modération les énergies fossiles et ont du chemin à faire pour améliorer leur «efficacité» énergétique : ils consomment trois fois plus de pétrole par point de croissance que leurs homologues de l'OCDE.

Loin de freiner leur consommation, les économies émergentes l'encouragent en subventionnant les prix des carburants sur leurs marchés intérieurs.

«Bien que plusieurs pays n'aient pas pu maintenir les subventions (sur les carburants) quand les prix du pétrole ont grimpé, la consommation subventionnée de pétrole a représenté la totalité de la croissance de la demande des cinq dernières annéees. 2008 n'a pas été une exception», développe M. Rühl.

Selon lui, les nouveaux consommateurs d'énergie doivent au contraire envisager les économies d'énergie comme un «avantage compétitif» déterminant pour le succès de leur industrialisation.

Ces subventions sont «un cadeau empoisonné» pour les économies émergentes à long terme, avertit M. Rühl, les invitant à suivre l'exemple de l'Indonésie, qui s'est engagée vers une libéralisation des tarifs de l'essence.