Ottawa se donne encore jusqu'au 15 mai avant de décider s'il ajoutera ou non des fonds pour venir en aide à l'industrie forestière.

Le gouvernement fédéral a ainsi annoncé lundi qu'il créait avec le gouvernement du Québec une «équipe spéciale Canada-Québec pour la foresterie».

Il s'agit de quelques hauts fonctionnaires des ministères concernés qui verront à trouver des moyens d'intervenir pour soutenir l'industrie forestière, les travailleurs et les communautés, tout en respectant l'accord de libre-échange et l'accord canado-américain sur le bois d'oeuvre.

Cette «équipe spéciale» doit faire rapport d'ici le 15 mai, ont annoncé les ministres Lisa Raitt (Ressources naturelles Canada), Denis Lebel (responsable de l'Agence de développement économique du Canada pour le Québec) et Claude Béchard (Ressources naturelles et Faune du Québec).

Vendredi dernier, Québec avait annoncé qu'il garantissait un prêt de 100 millions $ US pour AbitibiBowater seulement, qui vient de se placer sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers.

À cette occasion, le ministre Béchard s'était montré très insistant auprès du gouvernement fédéral, qui n'avait rien versé et se faisait tirer l'oreille en invoquant les restrictions de l'accord sur le bois d'oeuvre.

Lundi, aux côtés des deux ministres fédéraux, le ministre québécois s'est montré plus patient.

«Je ne m'attendais pas, bien sincèrement, à ce que les gens arrivent ce matin avec un chèque et nous remettent un chèque. Ce qui est important, pour nous aujourd'hui, c'est de voir que la porte est ouverte», a affirmé le ministre Béchard.

La ministre Raitt a rappelé que le gouvernement avait déjà mis à la disposition des municipalités un «Fonds d'adaptation des collectivités» de 1 milliard $ pour l'ensemble du Canada, soit 211 millions $ pour le Québec. Les petites municipalités aux prises avec la crise forestière pourront donc y puiser.

Les deux ordres de gouvernement tiennent à ce que divers thèmes soient abordés par cette «équipe spéciale Canada-Québec sur la foresterie», comme la sylviculture, le soutien aux travailleurs forestiers, l'accès au crédit, l'innovation technologique, le développement des marchés des produits du bois.

Les gouvernements ont encore prêché la prudence dans le contexte de l'accord canado-américain sur le bois d'oeuvre. «Avant d'aider ou de faire quoi que ce soit au niveau de l'industrie forestière, il faut s'assurer qu'on ne se nuit pas à nous-mêmes en faisant des choses qui vont être immédiatement contestées ou qui nous mettent à risque face au gouvernement américain. Il est clair qu'on veut respecter l'entente sur le bois d'oeuvre», a martelé le ministre Béchard.

Du côté de l'opposition péquiste, le député Denis Trottier, porte-parole pour les dossiers de mines et forêt, s'est étonné du fait que Québec et Ottawa n'en soient encore qu'à un comité conjoint. «Ce n'est pas sérieux après une crise forestière de cinq ans», a-t-il lancé.

Le député Trottier a rappelé que vendredi dernier, le ministre Béchard avait pourtant soutenu qu'il était «minuit moins une» et que le gouvernement fédéral devait prestement intervenir. «Et une fin de semaine plus tard, c'est cou-couche panier!», s'est exclamé le député péquiste.

À Ottawa, tant le chef libéral Michael Ignatieff que le chef bloquiste Gilles Duceppe ont jugé insuffisante la formation d'un comité conjoint, vu l'urgence de la situation et les milliers d'emplois en jeu.

«C'est dérisoire», a lancé M. Ignatieff.

«Qu'attend le gouvernement pour en offrir à l'industrie forestière comme il l'a fait à l'industrie de l'automobile?», a demandé à voix haute M. Duceppe.