La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Chaque vendredi, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite. Maxime Rémillard, président et chef de la direction de Groupe V Média et de Remstar, répond aujourd'hui aux questions de Stephen Rosenhek, président des boutiques Naturiste.

Au cours de votre carrière, vous avez participé à de nombreuses acquisitions d'entreprises. Est-ce que celles-ci ont toujours été couronnées de succès ? Selon vous, quelles sont les clés d'une acquisition réussie ?

Le succès a souvent été au rendez-vous, mais comme dans chaque carrière, il y en a eu de meilleures que d'autres. J'ai été chanceux la plupart du temps, mais certaines n'ont pas eu le résultat espéré. Selon moi, les clés d'une acquisition réussie résident dans trois choses. Il faut d'abord avoir une vision et un plan stratégique clairs. Ça a l'air d'une évidence, mais trop souvent, on voit des fusions et des acquisitions qui ne cadrent pas réellement dans le cadre stratégique d'une entreprise. L'intégration et le plan de synergie doivent aussi être en place dès le jour 1. La création de valeur est directement proportionnelle à la réussite de l'intégration. Finalement, il faut identifier des leaders de l'intégration. Ce sont ces gens qui vont faire de l'acquisition un succès à tous points de vue ou non.

Quelle est l'importance du soutien du gouvernement pour l'industrie canadienne de la production et la distribution de films et d'émissions de télévision ?

Le financement et le soutien des différents gouvernements sont essentiels pour notre industrie au Canada. C'est encore plus vrai au Québec. Vu la petitesse du marché québécois et le défi linguistique à l'exportation, comment pouvons-nous espérer compétitionner avec les géants américains et préserver notre diversité culturelle ? Il faut absolument avoir un apport des gouvernements. On assiste récemment, avec la montée en puissance des Netflix, Amazon Prime et autres services de contournement, à une véritable prédation culturelle de la part de ces entreprises-là. Elles ne payent pas de taxes, investissent minimalement dans notre culture et emploient très peu de gens. Face à cette compétition vraiment déloyale, on doit pouvoir compter sur l'aide du gouvernement, que ce soit par l'entremise des crédits d'impôt ou de Téléfilm Canada.

Le monde de la télé est en mutation profonde. On ne peut plus faire les choses comme avant. Encore là, nos compétiteurs s'appellent désormais Netflix, Google, Amazon ou Facebook. L'industrie a complètement changé, et ce, en très peu de temps. Le principal défi est la monétisation du contenu sur le web. Quatre-vingt-cinq pour cent des dollars publicitaires numériques mondiaux sont captés par Google et Facebook. Cependant, on voit aussi des opportunités. Aux États-Unis, les géants travaillent de plus en plus étroitement avec les détenteurs de contenu. On croit que ces plateformes sociales et numériques peuvent être des plateformes de diffusion intéressantes.

Quel rôle les administrateurs ou les conseillers indépendants jouent-ils pour vous aider à gérer et à développer votre entreprise ?

Pour nous, ce sont de vrais partenaires. On a la chance de bénéficier du partenariat des trois plus grands investisseurs institutionnels au Québec : Investissement Québec, la Caisse de dépôt et placement du Québec et le Fonds de solidarité FTQ. Ils comprennent notre industrie, ils connaissent nos défis et ils ont conscience de l'importance d'un joueur comme Groupe V Média ici au Québec et au Canada. Personnellement, je peux compter sur un conseil d'administration qui fait partie intégrante de notre stratégie et de notre plan de développement. Ce sont mes principaux conseillers. L'exécutif de Groupe V Média contribue aussi au développement et à la vision de l'entreprise.

Vous voyez-vous rester actif dans Remstar pendant de nombreuses années encore ou pensez-vous avoir de nouveaux défis à relever ?

Je vais continuer à être actif dans Remstar, et, oui, je veux relever de nouveaux défis. Groupe Remstar a connu une importante diversification dans les dernières années. L'entreprise est impliquée au-delà du divertissement. Elle possède des actifs dans plusieurs autres secteurs, comme la technologie, les communications, le transport ainsi que l'immobilier. Je suis présent dans toutes ces sphères d'activité, alors je vois beaucoup de défis à relever dans l'entreprise même.

Quelle a été la plus grosse erreur commerciale que vous avez faite et qu'en avez-vous appris ?

J'ai eu la chance de me lancer en affaires à un très jeune âge, alors j'ai fait plusieurs erreurs dans ma carrière ! Une erreur qui me reste en tête depuis longtemps, c'est lorsque, comme producteur de cinéma, j'avais l'opportunité de produire un film qui s'appelait Michael Clayton, qui était réalisé par Tony Gilroy et qui mettait en vedette George Clooney. Malheureusement, j'ai passé mon tour et le film a ensuite été sélectionné pour plusieurs Oscars, dont celui du meilleur film. Quand je le vois à la télé ou sur Apple TV, ça me rappelle toujours des souvenirs. J'en ai quand même tiré une leçon : ça m'a appris à faire confiance à mon instinct.

La semaine prochaine, Claude Marchand, président et chef de la direction de LCI Éducation, répond aux questions de Maxime Rémillard.

LE PARCOURS DE MAXIME RÉMILLARD EN BREF

Âge : 42 ans

Études : Maxime Rémillard est titulaire d'un baccalauréat en arts avec spécialisation en communication de l'Université d'Ottawa et il a fait une formation en production et réalisation à la University of Southern California (USC).

En poste depuis : 2009

Nombre d'employés : 200

Avant d'être à la tête de Groupe V Média :  Après l'université, Maxime Rémillard a fondé Remstar en 1998. C'était à l'origine une entreprise de production et de distribution cinématographique qui est maintenant une société d'investissement dans plusieurs domaines.