La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Chaque vendredi, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite.

Thierry St-Cyr, chef, infrastructures, projets spéciaux et affaires publiques de Taxelco, répond aujourd'hui aux questions de Chantal Glenisson, présidente-directrice générale des magasins Aubainerie.

L'intégration de deux entreprises et de leurs employés est un gros défi. Que désirez-vous pour les employés de Taxelco et comment faites-vous pour amalgamer les cultures  ?

C'est un gros défi qui est loin d'être terminé. En fait, il y a l'intégration de deux entreprises, Taxi Diamond et Taxi Hochelaga, et la création d'une nouvelle, Téo Taxi. Il y a encore trois sites distincts, qui seront regroupés en un endroit dans les prochains mois. On a aussi des gens qui viennent de différentes cultures d'entreprise. Il y a un chantier qui est en marche, et la première étape est de définir cette culture commune qui pourrait nous rassembler, peu importe nos origines au sein de Taxelco.

Ce sont non seulement trois entreprises qui s'intègrent, mais ce sont des entreprises de milieux complètement différents. Diamond et Hochelaga sont bien établies, elles sont sur leur erre d'aller, tandis que Téo est une start-up. Le rythme d'innovation et de changement y est très rapide. On part de loin, il faudra trouver nos façons communes de voir et d'appréhender les enjeux.

D'après vous, quel est le plus grand défi des leaders d'aujourd'hui pour les cinq prochaines années ?

Mobiliser les équipes. Pour réussir, le plus grand enjeu est la communication. Il faut communiquer ce que l'on veut faire et, de plus en plus, pourquoi. Ce n'est pas évident comme entreprise, parce qu'il y a des choses qu'on ne peut ou qu'on ne veut pas dire. Il faut trouver des façons que nos employés s'approprient nos objectifs. Au-delà du but lucratif, il y a de très fortes raisons pour venir travailler ici (bonnes conditions de travail, préoccupations environnementales, meilleur service pour les Montréalais). On le sent, les employés le disent souvent. Pour les entreprises traditionnelles, il faut trouver des façons de montrer aux employés qu'ils font partie de la solution.

Quelle entreprise est votre point de référence (votre exemple à suivre) et pourquoi  ?

Je suis bien inspiré par Tesla, une entreprise que je connais surtout comme consommateur. Je suis propriétaire d'une voiture Tesla et je lis un peu autour de ça. J'aime beaucoup leur motivation d'entreprise, basée sur des objectifs sociaux et environnementaux : diminuer l'empreinte carbone, trouver de nouvelles approches énergétiques, innover. C'est évidemment une entreprise à but lucratif, mais pas uniquement. Un peu comme nous. L'entreprise ne fait pas juste suivre une mode pour faire plus d'argent, elle crée un nouveau modèle qui refuse les conventions. Dans une industrie conservatrice, où il n'y a que des fusions d'entreprises, ils ont démontré que c'est possible de créer une nouvelle entreprise automobile et de changer les tendances. On fait face au même défi chez Téo. Le milieu du taxi est très ancien, conservateur, parfois sclérosé. On veut démontrer qu'il y a une autre façon de faire.

Quels ont été les deux plus grands défis de Taxelco à ce jour  ?

C'est d'abord un défi humain. C'est étrange pour une entreprise techno, mais les enjeux humains qui surgissent parce qu'on a des véhicules électriques, qu'on a un modèle de salariés, qu'on opère notre propre flotte, etc., occupent la plus grande part de mes journées. On veut offrir un service uniforme, qui doit être appliqué par tous les chauffeurs à chaque course. Plus on est nombreux, plus c'est difficile. Trouver comment mobiliser nos chauffeurs, s'assurer qu'ils contribuent, qu'ils restent authentiques, tout en donnant un service uniforme, c'est un jeu d'équilibriste.

La deuxième chose à laquelle on fait face, c'est la gestion de la croissance. On est victimes de notre succès. Téo a 120 véhicules présentement. La demande excède souvent notre offre, et on doit gérer ça. Ça nous prend plus de voitures, de permis de taxi et de chauffeurs, sans pour autant renoncer à la qualité.

Taxelco se dit une entreprise innovante. Quelles sont les prochaines initiatives importantes qui seront annoncées au public dans les deux ou trois prochaines années  ?

On veut sortir strictement du taxi. On veut pouvoir participer au cocktail de transport alternatif. On veut devenir un opérateur de véhicules électriques, mais pas seulement de taxis. Il y aura d'autres modes de transport, on ira vers la multimodalité, le transport de colis et de marchandise. Ce sont tous des éléments que l'on planifie et auxquels on réfléchit depuis le tout début du projet. On veut également s'étendre à l'échelle mondiale. Le point de départ est Montréal, ce sera ailleurs au Québec, et après, on veut aller à l'extérieur de la province.

Le parcours de Thierry St-Cyr en bref

Âge : 39 ans

Études : Thierry St-Cyr est titulaire d'un baccalauréat en génie de l'Université de Sherbrooke. 

En poste depuis : février 2015

Nombre d'employés : plus de 300, sans compter les chauffeurs de Taxi Diamond et d'Hochelaga

Avant d'être directeur des opérations : il a commencé sa carrière comme ingénieur chez Motorola avant de faire le saut en politique. Il a été député au Parlement fédéral, directeur de cabinet du ministre des Transports et des Affaires municipales, puis de la ministre des Ressources naturelles du Québec. Il a ensuite été directeur du développement stratégique chez RER Hydro.

La semaine prochaine, Charles Brindamour, chef de la direction d'Intact Corporation Financière, répond aux questions de Thierry St-Cyr.