La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Chaque semaine, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite.

Vous êtes à la barre d'Investissement Québec (IQ) depuis un an après une carrière diversifiée. Quels éléments de votre carrière vous apparaissent les plus pertinents dans votre rôle actuel ?

En travaillant beaucoup dans les régions du Québec, j'ai compris les enjeux économiques des différentes régions. J'ai appris sur le terrain la réalité du travail en investissement en travaillant avec les différents intervenants, comme les maires, les chambres de commerce, etc. Par la suite, j'ai géré trois grandes entreprises manufacturières. Là, j'ai appris à vendre des produits un peu partout sur la planète, tout en les fabriquant ici. J'ai aussi été président et chef de la direction d'une entreprise forestière publique. En 2012, mon entreprise a été achetée à la suite d'une offre hostile. J'ai appris beaucoup de cette expérience aussi, même si ce n'était pas souhaité.

Ici, je me sens comme un poisson dans l'eau. On a 17 bureaux régionaux et mon attachement aux régions fait partie de mon ADN. On a aussi 12 bureaux à l'étranger et, comme j'ai déjà parcouru la planète avec Bombardier, je me suis senti à l'aise dès le départ.

Lorsque vous évaluez des dossiers, comment établissez-vous un équilibre entre les retombées économiques et les responsabilités sociale et environnementale ?

Comme dans l'entreprise privée, on a à jongler avec tous ces éléments et à les conjuguer. Je l'ai fait dans le passé, mais on le fait de façon plus éloquente ici par notre rôle de modèle. Lorsqu'on investit dans une entreprise, on doit s'assurer que toutes les lois ainsi que les aspects environnemental et social sont respectés. Notre actionnaire, c'est le gouvernement du Québec et vous tous. On ne doit pas vous faire honte avec des projets qui ont mauvaise réputation. C'est primordial. Et quand on fait la promotion du Québec à l'étranger, notre économie verte est un élément vendeur.

Lorsque vous décidez d'investir, quels critères considérez-vous comme les plus importants : la création d'emplois, le développement de technologies innovantes ou l'émergence d'entreprises à valeur ajoutée ?

On gère deux types de comptes : les fonds propres (du capital-action du gouvernement qu'on investit pour avoir un rendement financier) et le fonds de développement économique. Ce dernier est surtout pour du long terme, pour la création ou le maintien d'emplois. Dans l'équation du retour, on met les revenus fiscaux associés à ces investissements, ce qu'aucune institution financière ne peut faire. Par exemple, après 20-25 ans d'investissement, on a créé une valeur incroyable dans l'industrie du jeu vidéo. On est les seuls à avoir un horizon à aussi long terme.

Les prêts semblent constituer le véhicule financier le plus utilisé. Quels secteurs d'activité et quelle taille d'entreprise soutenez-vous principalement ?

La moyenne de nos prêts à travers nos bureaux régionaux est de 500 000 $. Lorsqu'on investit dans de plus gros projets, on peut aller jusqu'à un maximum de 100 millions. On fait principalement du financement et, de plus en plus, du capital-action. On a désormais un rôle de partenaire. On soutient beaucoup le secteur manufacturier. Depuis 2011, il représente environ 60 % de nos interventions annuellement. Le reste va principalement aux technologies de l'information, à la transformation alimentaire et à l'économie sociale. On soutient des coopératives, des OSBL et des PME du Québec. D'ailleurs, la taille moyenne de l'entreprise que l'on soutient oscille entre 20 et 200 employés.

Quels sont les principaux défis d'IQ pour les cinq prochaines années, tant pour vos ressources humaines qu'en matière de qualité du service à la clientèle ?

On est en train de refaire notre plan stratégique. C'est l'occasion de concrétiser plusieurs actions qu'on a lancées depuis mon arrivée. La plus importante concerne notre approche client. Nos clients sont notre raison d'être, on y puise tout le sens dont on a besoin pour motiver nos troupes. J'ai voulu remettre ça à l'ordre du jour à mon entrée en poste. À ce moment-là, on ne parlait pas des clients, on parlait des dossiers. Ça ne me disait rien. J'ai voulu humaniser notre approche. Ç'a été une mini-révolution.

On a aussi sondé nos clients et ils veulent qu'on soit plus près d'eux, plus efficaces et plus agiles. J'ai donc dit à nos gens de sortir de leurs bureaux, d'aller sur le terrain et d'être plus proactifs.

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À lire la semaine prochaine : Marc Parent, président-directeur général de CAE, répond aux questions de Pierre Gabriel Côté.

PIERRE GABRIEL CÔTÉ EN BREF

Âge : 57 ans

Études : Il est titulaire d'un baccalauréat en génie mécanique de l'Université Laval et d'une formation de l'Institut des administrateurs de sociétés de l'Université McGill.

PDG depuis: le 12 janvier 2015

Nombre d'employés : 470

Avant d'être PDG : il était administrateur de sociétés et consultant en gestion depuis 2012. Auparavant, il a notamment été président et chef de la direction de Sucre Lantic, président de Bombardier aéronautique (division avions d'affaires) et président et chef de la direction de Fibrek.