La Presse donne la parole aux grands dirigeants du Québec. Chaque semaine, un patron répond à cinq questions posées par le chef d'entreprise interviewé la semaine précédente. Et ainsi de suite. Denis Richard, président de La Coop fédérée, répond aujourd'hui aux questions de Martin Carrier, vice-président et chef du studio de Jeux WB Montréal.

Q: En quoi le modèle de gestion est-il différent au sein du modèle d'entreprise coopératif? S'intègre-t-il dans ce qu'on appelle maintenant le capitalisme consciencieux?

R: Ça dépend du niveau de gestion dont il est question. Il n'y a pas vraiment de différence à la tête: on s'assure, comme toutes les entreprises, d'être prospère et d'atteindre nos objectifs.

Par contre, si j'achète des actions normalement, je veux du rendement à court terme. À La Coop, l'objectif des membres, qui sont copropriétaires, est à long terme. Ils veulent une entreprise qui leur offre de bons services, mais ils vont rester même dans les périodes creuses, parce qu'ils tiennent à améliorer leur entreprise et à maximiser les avantages. Comme on a un modèle de développement durable, on s'inscrit dans le capitalisme consciencieux.

Q: Comment peut-on favoriser la relève dans le domaine de l'entrepreneuriat agricole? Est-ce un défi particulier pour votre organisation?

R: La relève est un défi pour toutes les organisations qui veulent s'inscrire dans le temps. Nous avons un fonds de la relève pour inciter les jeunes à s'impliquer dans le conseil d'administration. Quand ils sont au coeur de l'entreprise et qu'ils ont un impact sur les décisions, les jeunes s'engagent plus.

Q: Comment se transmettent les valeurs d'une coopérative comme la vôtre lorsque celle-ci acquiert une nouvelle filiale comme BMR?

R: La Coop fédérée a réalisé beaucoup d'acquisitions au fil des ans. Ces entreprises avaient des valeurs plus ou moins près des nôtres, et on a dû les inciter à adopter notre façon de faire. Dans le cas de BMR, leurs valeurs ne sont pas loin, ce sera donc plus facile.

L'entreprise doit néanmoins comprendre notre modèle. Dans les cinq prochaines années, on va l'amener à s'adapter à nos méthodes et à notre fonctionnement.

Q: Comment partagez-vous votre temps entre vos fonctions de gestion à La Coop fédérée et votre implication comme producteur agricole?

R: C'est sûr que ça prend du monde qui s'occupe des détails, surtout que je suis aussi président du conseil d'administration d'Olymel et que je siège au conseil d'administration de La Coop Parisville ! Mon fils m'aidait à la ferme, mais il travaille maintenant en informatique. Je ne dis pas qu'il ne reviendra pas, mais pour l'instant, il veut explorer ce domaine. Ma femme m'aide dans la gestion de la ferme, et nous avons aussi des employés. Ce n'est pas très différent d'un patron qui dirige plusieurs divisions. C'est une question d'organisation.

Q: Quel est le rôle des nouvelles technologies de l'information dans le domaine de l'agriculture (ou dans votre modèle de gestion)?

R: En 10 ans, l'évolution a été importante. Les tracteurs se conduisent maintenant tout seuls, au moyen de l'autoguidage, alors que la cartographie se fait avec les GPS et les satellites.

La technologie est un incontournable, même en agriculture. On en parlait récemment, à la veille de l'assemblée annuelle: on devra maintenant utiliser le big data à La Coop pour aider nos membres.

Les données sont nombreuses, on pourra donc cibler les programmes d'accompagnement. Nos membres veulent tout faire sur leur cellulaire: vendre des bêtes, acheter du grain, vérifier le cours de la marchandise, etc. L'achat en ligne est aussi de plus en plus populaire, il faudra s'y adapter.

Le parcours de Denis Richard en bref

> Âge: 60 ans

> Études: Denis Richard est diplômé de l'École d'agriculture de Sainte-Croix. Il a également suivi des cours de formation aux adultes pour parfaire ses connaissances en agriculture, en gestion et en informatique.

> Président depuis: février 2003

> Nombre d'employés: près de 16 000

> Avant d'être à la tête de La Coop fédérée: Denis Richard est producteur agricole depuis 1979. Il exploite une entreprise de céréaliculture à Leclercville. Il a aussi occupé plusieurs fonctions à La Coop fédérée depuis 1993.