Elles sont l'outil idéal pour les quelque 200 000 petites entreprises du Québec qui n'ont ni le temps ni les ressources nécessaires pour encadrer la formation de leurs employés. Pourtant, les mutuelles de formation territoriales (MFT) sont encore méconnues, voire sous-utilisées dans la Belle Province.

À une époque où le développement des compétences est devenu un enjeu partout sur la planète, certaines mutuelles québécoises risquent de disparaître, sinon de réduire leurs bienfaits dans l'économie québécoise. Pourquoi? Parce qu'elles manquent de financement.

Il faut d'ailleurs faire la distinction entre les différents types de mutuelles de formation qui existent au Québec. Il y a les entreprises qui se regroupent afin de se doter de ressources et de services communs. Puis, il y a les mutuelles rattachées à quelques-uns des 30 comités sectoriels au Québec. Celles-ci sont gérées et financées par leur comité sectoriel respectif.

Viennent ensuite les mutuelles de formation territoriales. On y offre des formations en lien avec le marketing, l'administration, les finances, les ressources humaines et la production. Elles dépendent d'une aide financière triennale de même que des droits de cotisation payés par leurs membres. Il y a actuellement quatre MFT au Québec: deux à Montréal, une à Québec et une à Saguenay. Une nouvelle MFT doit voir le jour sous peu dans Lanaudière.

Marcel Pedneault est directeur général de Forma'PME, une mutuelle de formation territoriale située à Saint-Léonard. L'organisme qu'il dirige a pour mandat d'approcher de petites entreprises, d'évaluer leurs besoins en termes de formation, de créer des groupes d'employés issus de différentes entreprises (d'où l'appellation «mutuelle») qui recevront une formation commune, puis de faire un suivi.

Beaucoup pour peu

Tout cela sans qu'il en coûte une fortune aux entreprises. En fait, pour être membre d'une mutuelle de formation territoriale, une entreprise doit débourser l'équivalent de 0,2 à 0,5 % de sa masse salariale. Ce qui est peu quand on considère ce que les MFT offrent en retour.

Par exemple, durant les formations (échelonnées sur une ou deux journées), les salaires des employés sont remboursés jusqu'à concurrence de 20 $ l'heure. Les repas, les déplacements et le café sont également compris.

«L'offre de service est presque trop belle. Les dirigeants d'entreprises se méfient quand je vais à leur rencontre. Pourtant, c'est de l'argent public qui leur appartient. C'est ce que je m'efforce de leur rappeler», explique Marcel Pedneault.

Créées en 2009 dans le cadre du Pacte pour l'emploi, une initiative mise de l'avant pour aider les PME à maintenir leurs effectifs dans la foulée de la crise financière, les mutuelles de formation territoriales répondent clairement à un besoin, croit Paul Bélanger, directeur de l'Observatoire compétence-emploi à l'UQAM.

Mais selon lui, les MFT manquent de ressources financières. Les formations qu'elles coordonnent, entre autres choses, sont payées par la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT). Sinon, les mutuelles reçoivent un budget de fonctionnement de 150 000 $ lors de leur première année, 100 000 $ lors de la deuxième et 50 000 $ lors de la troisième. Puis, plus rien, si ce n'est les cotisations des membres, nettement insuffisantes pour combler le manque à gagner.

«Ça fait en sorte que les mutuelles vont se limiter à un rôle de courtier, c'est-à-dire qu'elles vont simplement mettre en lien des PME et des formateurs. Pour que les résultats soient concluants, une mutuelle doit faire du travail en amont. Elle doit rencontrer les entreprises, cerner leurs besoins, les orienter vers les bonnes formations, etc. Ce modèle fonctionne en Europe; pourquoi pas ici?» s'interroge Paul Bélanger.

Au bureau d'Agnès Maltais, ministre du Travail, on préfère ne pas se prononcer quant au financement à long terme des mutuelles de formation territoriales.

«C'est un dossier important pour notre ministère. Nous travaillons de concert avec les mutuelles, car nous jugeons qu'elles sont du domaine de l'innovation. Nous sommes conscients qu'il faudra apporter des ajustements», a dit Catherine Gauthier, attachée de presse au cabinet de la ministre Maltais.