Le transfert des connaissances est sans doute l'un des sujets les plus brûlants d'actualité en cette époque de pénurie de main-d'oeuvre qualifiée et de départs massifs à la retraite des baby-boomers. En parler ne suffit plus. Il faut passer à l'action. Voici quelques pistes de solution.

Les pratiques en ressources humaines sont au coeur même du transfert des connaissances, croit Sylvie Guerrero, professeure au Département organisation et ressources humaines à l'École des sciences de la gestion de l'UQAM. Le mentorat, le coaching ou l'embauche de consultants font partie de la solution, dit-elle.

«Mais pour que cela fonctionne, il faut attribuer de nouveaux rôles aux travailleurs expérimentés déjà employés par l'entreprise. Une étude de l'Université de Windsor (Armstrong-Staasen&Schlosser; 2001) démontre toutefois que ces réaffectations doivent être valorisées si on veut qu'elles fonctionnent», explique Mme Guerrero.

Il faut d'ailleurs se débarrasser de ce vieux réflexe voulant que lorsque l'économie tourne au ralenti, on licencie les travailleurs en âge de prendre leur retraite. «Les stéréotypes voulant que les travailleurs plus âgés soient plus conservateurs et plus résistants aux changements sont trop bien ancrés», déplore la prof de l'UQAM.

Une véritable mine d'or

Alain Gosselin, de HEC Montréal, croit que le problème pour les entreprises est plus qualitatif (continuité dans les connaissances et les réseaux) que quantitatif (trouver assez d'employés pour remplacer ceux qui partent). Bref, les travailleurs d'expérience sont une véritable mine d'or dans le contexte actuel, soutient le professeur titulaire au Service de l'enseignement de la gestion des ressources humaines.

Selon lui, le mentorat (accompagnement d'un employé plus jeune par un employé d'expérience sur une assez longue période de temps), la codification des connaissances implicites ou tacites (par écrit, sur vidéo, etc.) et le shadowing, c'est-à-dire l'observation d'un employé expérimenté pendant un certain temps, font partie des pratiques gagnantes.

L'exemple d'IBM Bromont

À l'usine IBM de Bromont, le transfert des connaissances est un enjeu de tous les instants. «Notre avantage concurrentiel réside dans la compétence de nos gens. Le partage des connaissances est un sujet critique pour nous. Nous devons offrir à nos employés tous les outils nécessaires pour maintenir leur niveau de connaissance le plus élevé possible», disent à l'unisson Claire Langan, directrice de l'excellence opérationnelle et innovation, et François Nadeau, directeur du développement des compétences.

C'est pourquoi la multinationale qui emploie plus de 2000 personnes dans ses installations des Cantons-de-l'Est met beaucoup d'énergie à stimuler et à encourager la polyvalence et le dépassement de soi au sein de ses troupes.

Comment? En mettant en place des équipes «gestion du savoir» dont le but est d'aider au développement de la relève. Dans ces mêmes équipes, on retrouve des communautés de pratique dans lesquelles on vise l'amélioration continue, par exemple au moyen de conférences bihebdomadaires ou de forums de discussion sur le site interne BromontPédia. Celui-ci compte actuellement 45 sujets qui sont constamment bonifiés.

«On encourage également ce qu'on appelle le 3 X 10, c'est-à-dire trois changements de responsabilité et de fonctions en 10 ans, indique encore Claire Langan. On apprend en changeant de service. On apporte son expérience et on se connecte à un nouvel environnement. Chez nous, qu'un employé ait 10 ou 25 ans d'expérience, notre but est qu'il continue d'apprendre.»