Depuis quatre ans, Denise Lemieux enseigne les arts plastiques à l'école de Kuujjuarapik, village inuit sur la côte de la baie d'Hudson. C'est un peu par hasard que la jeune femme de 33 ans s'est retrouvée dans le Nord et dans le domaine des arts. Originaire de Grande-Vallée, en Gaspésie, elle a étudié d'abord en tourisme puis a obtenu un bac un enseignement.    

Elle a enseigné par la suite en Chine et à Montréal. Mais quand sa mère, retraitée de l'enseignement partie enseigner au Nunavik, s'est cassé une jambe, l'école a cherché une remplaçante pour quelques semaines. «C'est comme ça que je suis arrivée dans le Nord», se rappelle Denise Lemieux. Les quelques semaines se sont transformées en quelques années.

«J'ai une formation en enseignement secondaire et en histoire-géo, mais l'école était à la recherche d'un professeur d'arts plastiques. J'ai toujours été passionnée par les arts, mais j'ai dû apprendre sur le tas», continue-t-elle.

L'école de Kuujjuarapik est la seule du Nunavik à offrir depuis six ans un cours d'arts plastiques et dispose d'un très bon budget pour la matière. Denise Lemieux enseigne aux 140 élèves de l'école, du secteur anglophone et francophone de la 1re année à la 5e secondaire. Les élèves ont d'un à trois cours par semaine et apprennent à travailler avec différents médias. Ils découvrent les nombreuses formes d'art dans le monde.

«Ici, il n'y a pas de journée type. Quand il arrive quelque chose dans le village, ça a une répercussion directe dans l'école. S'il y a un blizzard, s'il fait très froid ou si quelqu'un meurt dans la communauté, il n'y a pas d'école», explique Denise Lemieux.

«Il faut s'adapter, c'est le plus grand défi dans le Nord. Tout est différent. Dans le Sud, les jeunes veulent des notes, ils veulent avoir un métier. Ici, ils vivent davantage dans le présent. Ils ont besoin de se sentir en confiance. Mais les enseignants ne restent jamais longtemps, c'est difficile pour eux. Au début on ne le sait pas, on se remet en question, on pense qu'on n'avance pas.»

Pour Denise Lemieux, l'enseignement de la matière est parfois secondaire. «Il y a beaucoup de problèmes sociaux et les besoins fondamentaux des élèves ne sont pas toujours comblés», constate-t-elle.

Les élèves ne maîtrisent aussi pas tous le français. Ils parlent le plus souvent inuktitut à la maison, parfois aussi le cri, car Kuujjuarapik est collé au seul village cri du Nunavik, Whapmagoostui. Ils parlent anglais entre amis et français seulement à l'école. «C'est compliqué d'enseigner une matière quand les jeunes ne comprennent pas la langue», remarque Denise Lemieux.

«Chaque année, je me pose la question de savoir si je vais rester l'année suivante. Mais je reste. C'était l'aventure au début et c'est encore l'aventure, il n'y pas de routine. La première année est difficile, il faut s'adapter. Mais c'est de plus en plus facile.»

«Ce sont surtout les petites choses qui donnent le plus envie de rester. Par exemple, au début, les élèves étaient gênés de voir leurs oeuvres exposées dans l'école. Les plus jeunes complimentaient les plus âgés, mais ceux-ci n'étaient pas habitués. Maintenant, ils développent un sentiment de fierté.»