Un emploi, c'est un peu comme le grand amour. Une offre de rêve peut survenir à un moment imprévu, alors qu'on a déjà un emploi satisfaisant. Il faut alors la refuser, mais avec doigté. Sinon, le recruteur, qui se retrouve devant un casse-tête, risque de marquer au fer rouge le candidat. Comment refuser le poste sans couper définitivement les ponts? Voici quelques conseils de spécialistes en recrutement.

Depuis une vingtaine d'années, Louise Martel recrute des cadres pour les clients de la firme Raymond Chabot Grant Thornton. Il lui arrive de rencontrer des gens qui changent d'idée à la dernière minute.

Le pire cauchemar des recruteurs, c'est de recevoir un appel téléphonique un dimanche soir, vers 22h. «Les gens se désistent du processus de sélection en nous laissant un message sur notre boîte vocale. De cette façon, ils sont sûrs qu'on ne pourra pas les joindre», déplore Mme Martel.

Un certain lundi matin, un nouvel employé devait se présenter chez Frima Studio, concepteur de jeux vidéo de Québec. L'entreprise est justement dans un créneau où les plus talentueux reçoivent plusieurs offres en même temps. L'employeur doit alors littéralement faire des pirouettes pour retenir son personnel.

«La personne est venue nous porter une lettre expliquant avoir reçu une autre offre plus avantageuse. J'aurais préféré qu'elle nous téléphone», indique Mélanie Rancourt, conseillère en ressources humaines chez Frima Studio.

La meilleure façon

Quelle est la meilleure façon de décliner une offre? Les recruteurs interrogés sur le sujet ne sont pas tous du même avis. «L'idéal, c'est d'envoyer une lettre à l'employeur le remerciant de la rencontre, en lui indiquant que pour X raisons, je ne peux accepter votre emploi», explique Mme Martel.

Lors du processus de recrutement, les rencontres ont peut-être permis de réaliser qu'on n'est pas prêt à quitter son travail. «On ajoute alors qu'on espère garder contact, car on ne connaît jamais l'avenir.»

Guy Adam, directeur des services de placements permanents chez Robert Half, privilégie plutôt l'appel téléphonique. «Je trouve qu'écrire une lettre ou un courriel, c'est très impersonnel. Au téléphone, on peut mieux expliquer les raisons de son refus.»

Tous les recruteurs s'entendent sur l'importance de garder une communication positive. Mélanie Rancourt se rappelle un candidat - son premier choix - qui avait refusé l'emploi à la suite d'une contre-offre de son employeur. «Il nous a expliqué les raisons au téléphone. Finalement, six mois plus tard, il nous a écrit qu'il regrettait sa décision. Cet employé fait maintenant partie de notre équipe.»

Le chasseur de têtes Yves Elkas constate que le recrutement est plus difficile en ce moment. «Le climat économique laisse entrevoir des signes de ralentissement. Les gens sont très prudents avant de changer d'emploi. Ils préfèrent rester dans leurs bonnes vieilles pantoufles.»

La contre-offre

Les recruteurs estiment que l'acceptation d'une contre-offre de son employeur n'est pas toujours une bonne chose. «Plus de 80% des gens qui ont accepté une contre-offre de l'employeur ne sont plus en poste après six mois», constate M. Adam.

«Le salaire, ajoute-t-il, est parfois la pire des motivations. L'employé a peut-être accepté une bonne augmentation de salaire, mais les raisons qui l'incitaient à partir sont toujours là: incompatibilité avec son patron, ennui au travail, manque de reconnaissance, etc.»

En conséquence, M. Adam précise que certains employeurs vont déjà commencer à remplacer l'employé qui vient d'accepter la contre-offre. «Plusieurs entreprises amorcent des démarches pour trouver un remplaçant», soutient-il.

En conclusion, les spécialistes en recrutement recommandent de refuser une offre en demeurant le plus cordial possible. La courtoisie est toujours de mise. «On remercie l'employeur et on s'excuse des inconvénients qu'entraîne notre décision. N'oubliez pas, votre réputation est l'attribut professionnel le plus important», conclut M. Adam.