Les employeurs qui négligent les différentes réalités générationnelles dans leur organisation risquent d'avoir de mauvaises surprises. Et les employés aussi. Josée Garceau, auteure du nouveau livre La cohabitation des générations, publié aux Éditions La Presse, fait le point.

«Les gens vivent plus longtemps qu'auparavant, et dans certains milieux de travail, trois générations se côtoient, dit-elle. Si on veut que cela se fasse dans l'harmonie, il faut tenir compte de ce phénomène. Sinon, on met en place des mesures qui ne sont pas adaptées aux valeurs des employés. Comme travailleur, prendre le temps de bien comprendre les réalités de chaque génération dans son organisation permet de mieux s'adapter à son milieu de travail. Comme employeur, cela permet de mieux s'adapter aux besoins du personnel.»

Le rapport au travail de chaque génération est différent. Dans son livre, l'auteure explique bien les différences entre la génération traditionnelle (ceux qui sont nés entre 1901 et 1944), les baby-boomers (1945-1964), la génération X (1965-1981) et la génération Y (1982-2000). Naturellement, il existera toujours des différences individuelles, mais on peut tout de même trouver certaines valeurs et attitudes communes à la plupart des individus d'une même génération.

«Pour plusieurs baby-boomers, le travail, la réussite et la carrière sont la grande priorité, dit-elle. Ils y consacrent énormément de temps, participent à des comités et sont très engagés dans leur milieu professionnel. Tandis que les X accordent plus d'importance à leurs enfants et à l'équilibre travail-famille. Ils ont le goût de faire simplement les heures pour lesquelles ils sont payés. Quand le baby-boomer regarde le X qui refuse les heures supplémentaires, il se dit qu'il est paresseux. Le X observe le baby-boomer qui reste au bureau le soir et se dit: «Il ne doit pas avoir de vie et il est sûrement très mal organisé pour être obligé de faire cela.» Si tu ne comprends pas que la vision de tes collègues est tout simplement différente de la tienne, tes opinions sur eux sont faussées et cela génère des tensions qui font que le climat de travail est moins agréable.»

Milieu de vie

Autre source d'incompréhension: l'aspect social du travail. Pour le baby-boomer, il est primordial. «Pour lui, le travail est un lieu de vie, dit-elle. Il met du temps à développer des relations harmonieuses, à tisser des liens. Il a besoin de cela pour être heureux au travail, alors que le X ressent moins ce besoin; souvent, cette socialisation représente même pour lui une perte de temps. Il déteste «jouer le jeu» et se faire du capital politique.»

Quant au Y, il est dans une classe à part. Il donnera beaucoup de temps si son travail le passionne, mais davantage par plaisir que par ambition. «Si un projet l'intéresse vraiment et rejoint ses valeurs, il va se donner à 100%. Mais il n'aura pas le goût d'en donner plus à un employeur en qui il n'a pas confiance.»

Plusieurs sujets sont donc source de frictions entre employés de générations différentes: les heures supplémentaires, l'engagement syndical, la relation au temps et l'utilisation des technologies, notamment.

Pour prévenir les malentendus, une organisation devrait accorder plus d'importance à l'accueil d'un nouvel employé, en prenant le temps de lui expliquer très clairement ses valeurs, sa culture, son fonctionnement et les attentes professionnelles. On devrait aussi dresser un bilan générationnel des ressources humaines, communiquer clairement et favoriser le mentorat de réciprocité.

«Dans le mentorat traditionnel, c'est surtout la personne la plus expérimentée qui apprend des choses au jeune. Dans un mentorat de réciprocité, chacun reçoit l'un de l'autre.»