Bien des retraités décident de retourner au boulot. Plusieurs souhaitent toutefois un emploi différent.

Consultant pour différentes entreprises, auteur et conférencier: le Dr Yves Lamontagne est un privilégié. Ancien PDG du Collège des médecins, il est une figure connue de la profession. Lorsqu'il a pris sa retraite il y a un an, les offres se sont multipliées. Pas question par contre qu'il accepte n'importe quoi!

«Si ça ne m'intéresse pas, ou si je n'ai pas les compétences nécessaires, je refuse», affirme le Dr Lamontagne.

Pas question pour lui non plus de prendre des mois de repos.

«C'est important de garder le rythme, affirme celui qui a répondu aux questions de La Presse un lundi à 7h45! J'ai toujours cru que le travail, c'est la santé.»

C'est ainsi que le Dr Lamontagne a été pendant quelques mois consultant pour relever un département de psychiatrie dans un hôpital. Il est aussi consultant pour une compagnie active dans le domaine des dossiers informatisés des patients et pour une compagnie pharmaceutique. Il est également conférencier et dans ses temps plus tranquilles, il travaille sur ses projets de livre. Une nouvelle édition de son ouvrage Être parent dans un monde de fou est d'ailleurs paru en septembre.

«Je préfère travailler dans ces dossiers plutôt que de me bercer», affirme le Dr Lamontagne.

«La tendance du retour au travail va dans le sens de tout ce qui touche à la vieillesse active», affirme Tania Saba, professeure à l'École de relations industrielles de l'Université de Montréal.

D'après Statistique Canada, le nombre de personnes qui faisaient une activité rémunérée après avoir pris leur retraite ou commencé à toucher une pension a augmenté de plus 40 % entre 1999 et 2004. Le nombre est passé de 461 000 à 654 000, ce qui représentait respectivement 7,9 % et 9,7 %.

Le genre de travail

Ces retraités toujours actifs dans le monde du travail peuvent être d'une grande valeur pour plusieurs organisations, d'après Anne Bourhis, professeure au département de gestion des ressources humaines à HEC Montréal.

«C'est particulièrement vrai dans des postes où on acquiert plusieurs compétences grâce à l'expérience», précise-t-elle.

Encore faut-il savoir comment permettre à ces retraités de se réaliser pleinement dans un nouveau boulot.

«Souvent, les retraités souhaitent continuer à contribuer, mais sous une autre forme. Certains vont souhaiter partager leurs connaissances. Cela peut se faire par exemple en formant la relève», indique Mme Bourhis.

La professeure croit également qu'il faut éviter de forcer les gens d'expérience à développer de nouvelles compétences.

«S'ils n'ont jamais travaillé avec les médias sociaux, on est mieux de ne pas leur imposer. Il faut valoriser ce pour quoi on est allé les chercher», affirme-t-elle.

Une adaptation pour l'organisation

L'arrivée de cette éminence grise dans les organisations entraine nécessairement des défis pour les gestionnaires.

«Plusieurs de ces retraités ne veulent pas recommencer à travailler du lundi au vendredi de 9h à 17h à longueur d'année», remarque Anne Bourhis.

Le Dr Lamontagne par exemple est aujourd'hui maître de son horaire.

«Je ne travaillerais pas à temps plein et je n'accepterais pas de devenir employé. Je signe par contre des contrats avec des mandats très clairs que je dois réaliser dans un temps donné avec un honoraire. Tout est écrit.»

Anne Bourhis remarque qu'avec la pénurie de main-d'oeuvre, les entreprises commencent à faire des ajustements.

«Encore souvent, pour un employeur, soit un employé est là complètement, ou pas du tout. Il n'y a pas d'entre-deux. Pourtant, certains retraités seraient prêts à retourner au travail quelques jours par semaine. D'autres seraient prêts pour du temps plein, mais seulement six mois par année parce qu'ils passent l'hiver dans le Sud. D'autres veulent être en vacances tout l'été. Il faut différentes formes de travail à temps partiel, des mandats spéciaux, des retraites progressives, etc.»

La clé, selon Tania Saba, c'est que les organisations arrivent à bien gérer la diversité.

«Les gens n'ont pas tous les mêmes besoins, affirme-t-elle. En fin de carrière, certains veulent continuer comme avant, d'autres veulent plus de temps libres, d'autres veulent partir au plus vite. On ne peut pas appliquer le même principe pour tout le monde.»