Alors que la retraite à 55 ans semble une idée de plus en plus dépassée, nombreux sont les adultes qui décident qu'il n'est pas trop tard pour apprendre et améliorer leur sort professionnel.

Retourner sur les bancs d'école à 50 ans? Pourquoi pas? C'est ce que s'est dit Lucie Lemieux, mère de six enfants. Après avoir obtenu un premier DEP en finition de meubles, elle s'est lancée dans un deuxième, en ébénisterie, au Centre de formation professionnelle des Patriotes, à Sainte-Julie.

«Plus jeune, j'avais commencé des études en économie mais j'ai abandonné, dit-elle. Je n'ai jamais vraiment rien terminé, et je ne voulais pas rester avec des regrets. J'ai pensé à 50 ans que cela valait encore la peine de foncer. Et tant qu'à étudier, j'ai choisi quelque chose que j'aime!»

Détermination

La perte de son emploi a obligé Jules Michaud (nom fictif), 49 ans, lui aussi étudiant en finition de meubles, à se réorienter. Après 10 ans comme opérateur informatique au sein de la même entreprise, son poste a été supprimé. Il a décidé qu'il en avait assez du travail de bureau et s'est lancé lui aussi dans le meuble et l'ébénisterie, un domaine où les perspectives d'emploi sont bonnes. C'est bien beau d'aller à l'école, mais il faut continuer à payer les factures! Jules Michaud travaille donc les week-ends et deux soirs par semaine, tout en allant à ses cours à temps plein.

«C'est un peu difficile comme rythme, mais on s'habitue, dit-il. Si je fais tout cela, c'est dans le but de trouver un bon emploi, avec des avantages sociaux.»

Il est déterminé, et il n'est pas une exception. Ces étudiants plus âgés que la moyenne savent ce qu'ils veulent et c'est visible en classe, explique Christian Lemonde, professeur au CFP des Patriotes.

«Ce sont des étudiants exceptionnels parce que c'est un choix qu'ils ont fait, dit-il. Ils sont très appréciés des employeurs. Toutefois, parmi nos élèves plus âgés, la majorité le fait non pas pour aller sur le marché du travail, mais pour avoir une nouvelle occupation à la retraite. Ils s'outillent entièrement pour avoir leur petit atelier chez eux.»

Changer sa vie

Il n'est jamais trop tard pour bien faire! Madeleine Loyer, 55 ans, en sait quelque chose. Obligée d'abandonner l'école à 17 ans à cause de la pauvreté, cette mère de huit enfants, qui sera bientôt grand-mère pour la 21e fois, a décidé de terminer son secondaire!

Depuis juillet dernier, elle étudie à temps plein le français, l'anglais, les mathématiques et l'informatique au Centre d'éducation des adultes Jeanne Sauvé, à Dorval. D'ici trois ans, elle aura terminé son secondaire ainsi qu'une formation professionnelle qu'elle n'a pas encore choisie.

«Avant de me décider, j'étais découragée, dit-elle. J'ai toujours eu des emplois durs, au salaire minimum, et je me sentais nulle. Je ne voulais plus accepter ça! Je me suis dit que j'étais encore capable d'apprendre et d'évoluer. Avec ma formation, je vais avoir un meilleur emploi et un meilleur salaire. Il me reste encore quelques années à travailler pour avoir une retraite décente.»

Les premiers mois de ce retour aux études n'ont pas été faciles. «Au début, j'avais l'impression d'être bombardée dans la tête, dit-elle. On t'informe sans arrêt et tu dois laisser de côté une partie des anciennes méthodes apprises il y a longtemps pour en acquérir de nouvelles. Mais on finit par apprendre à mieux gérer tout cela.»

Pour un adulte qui a quitté l'école depuis longtemps et qui a vécu des échecs scolaires étant plus jeune, il n'est pas évident de se remettre à étudier, explique Frédéric Hurtubise, travailleur social au Centre Jeanne Sauvé.

«Il faut remettre la machine intellectuelle en marche et reprendre confiance en ses moyens, dit-il. Et ce n'est pas juste la responsabilité de l'individu. Il faut un soutien de l'entourage et des proches.»

La Semaine québécoise des adultes en formation aura lieu du 2 au 10 avril prochains.