Même si la crise économique a été moins virulente au Canada qu'aux États-Unis et ailleurs dans le monde, plusieurs travailleurs canadiens en ont subi les soubresauts. Et ils sont nombreux à mettre de l'espoir dans la nouvelle année quant à l'amélioration de leurs conditions de travail.

Selon l'étude trimestrielle Workmonitor, de Randstad, conduite dans une cinquantaine de pays dont le Canada, une majorité de Canadiens croient que leurs conditions de travail, notamment leur salaire, s'amélioreront en 2011.

«Cette étude sert à prendre le pouls du marché de l'emploi canadien, mais selon la perspective des employés, explique Marc-Étienne Julien, président de la division recrutement pour Randstad Canada. Ce qui est intéressant dans cette étude, c'est de constater que le niveau d'optimisme des Canadiens est très élevé par rapport au marché du travail; parmi tous les pays sondés, le Canada est le troisième plus optimiste, derrière la Chine et l'Inde, des marchés en pleine explosion!»

Effectivement, 69% des employés s'attendent à une augmentation de salaire au cours de leur prochaine évaluation de rendement, 67% à une amélioration de leurs conditions de travail de base, alors que près de la moitié des travailleurs s'attendent à une promotion cette année.

Rareté de la main-d'oeuvre

Nombre de Canadiens ont dû mettre les bouchées doubles pour contribuer à la survie de leur entreprise en 2009 et 2010, et certains ont par le fait même acquis de nouvelles compétences. Pas étonnant que plusieurs espèrent voir leurs efforts récompensés, qu'on pense au salaire ou à l'avancement professionnel, croit M. Julien, qui conseille aux employeurs «d'être à l'affût de ces tendances car, avec la reprise économique, il y aura plus de compétition pour l'attrait des nouveaux talents et il faudra aussi mettre l'accent sur la rétention du personnel».

Cette réalité concerne tout particulièrement les secteurs où la main-d'oeuvre se fait rare. «Dans le secteur de l'aérospatiale, nous avons réussi à négocier récemment des gains salariaux et pour le régime de retraite», explique Sylvain Martin, président de la division régional 510 du syndicat canadien TCA, représentant 3300 travailleurs du secteur manufacturier au Québec, dont ceux de Pratt&Whitney.

«Mais ces gains ne sont pas le fruit du hasard! ajoute-t-il. On prévoit une reprise de ce secteur en 2012, ce qui va provoquer une rareté de la main-d'oeuvre. Les employeurs sont donc portés à mettre la table pour attirer les travailleurs.»

Espoir ou réalité?

Autrement, les espoirs des travailleurs ont-ils une chance de se réaliser ou demeureront-ils lettre morte? «Au cours des trois dernières années, on a tellement atteint les bas-fonds dans le secteur manufacturier, qu'on peut se permettre en 2011 d'être un peu optimiste, même si la parité du dollar canadien est inquiétante pour la reprise», croit M. Martin.

Selon M. Julien, «les espoirs semblent être fondés, car les gens répondent en se basant sur ce qu'ils observent dans leur milieu de travail». Ainsi, toujours selon l'étude, 58% des Canadiens affirment que leurs conditions se sont améliorées au cours de la dernière année, une plus grande proportion que chez les employés australiens ou américains.

Roch Laflamme, professeur de sciences sociales à l'Université Laval, croit pour sa part que beaucoup d'employés ont des attentes irréalistes. «Plusieurs entreprises seront plutôt portées à utiliser l'argent que les employés s'attendent à recevoir pour réinvestir afin d'assurer leur croissance. Et plusieurs pourront être tenté de déménager là où la main-d'oeuvre est moins chère, à l'image d'Electrolux», avertit-il.

«C'est normal qu'après avoir beaucoup travaillé et s'être serré la ceinture, les employés aient de l'espoir quant à l'amélioration de leurs conditions de travail. Mais le travailleur qui n'a pas une influence marquée dans son organisation risque d'écoper, prévoit M. Laflamme. Probablement que, dans un an, ces attentes se seront amenuisées, d'autant plus qu'une autre crise, la crise alimentaire, se profile à l'horizon.»